Tribunal de la jeunesse de Nivelles - Article 374 du Code civil
Tribunal de la jeunesse de Nivelles - Article 374 du Code civil
Présentation des faits1
Madame A et Monsieur B ont deux enfants, C âgée de 8 ans et D âgé de 5 ans. Les parents ont divorcés en 2007 à Londres. A cette époque, c’est Madame A qui a obtenu l’hébergement principal des enfants alors que le papa avait des rencontres régulières qui étaient organisées avec les enfants.
Peu de temps après, Madame A a déposé plainte contre Monsieur B pour maltraitance à l’égard de D.
Un jugement anglais a, par la suite, entériné un accord des parents qui prévoyait que Madame A pouvait déménager avec les enfants en Belgique et que le papa était autorisé à venir voir ses enfants mais en présence d’un tiers.
Quelques années plus tard, Madame A s’est installée à Nice avec les deux enfants. Monsieur B a durant cette période très peu vu ses enfants. Madame A a décidé, pour finir, de revenir vivre en Belgique avec les enfants.
En novembre 2010, Madame a indiqué à Monsieur B qu’elle avait des problèmes de santé et qu’il fallait donc déménager vers un climat plus chaud (Nice). Monsieur B n’a jamais réagi de sorte que Madame A a introduit une demande devant le Tribunal de Nivelles.
Décision du Tribunal
Le Tribunal va examiner si la demande de déménagement vers Nice est ou non dans l’intérêt des enfants.
Le Tribunal constate au regard des pièces du dossier que le déménagement de Madame A repose sur des motifs médicaux sérieux.
Outre les problèmes de santé, Madame A présente au Tribunal un projet de vie stable à Nice, à savoir, un emploi pour elle, l’inscription des enfants à l’école.
Par conséquent, le juge estime qu’il est de l’intérêt des enfants d’avoir, à leurs côtés, un parent en bonne santé qui est apte à prendre soin d’eux et à répondre à leurs besoins.
A partir du moment où le déménagement ne met ni à mal le lien avec le père des enfants, ni le cursus scolaire des enfants, il doit être autorisé.
Le juge fait droit à la demande de Madame A.
Bon à savoir
Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 18 juillet 20062, le juge privilégie l'hébergement égalitaire du ou des enfants entre les parents. Cela étant, il existe des circonstances dites exceptionnelles dans lesquelles le juge peut prévoir un autre modèle d'hébergement en motivant sa décision.
A cet égard, le législateur n'a pas souhaité déterminer quelles sont les circonstances dites exceptionnelles, laissant ainsi le juge user de son pouvoir d'appréciation. Néanmoins, les travaux préparatoires de la loi3 citent de manière non-exhaustive des circonstances dites exceptionnelles. Cette liste reprend, notamment, l'éloignement géographique significatif des parents.
En effet, l'hébergement égalitaire n'est peu ou pas envisageable lorsque les parents résident à des endroits géographiquement éloignés.
Par conséquent, les débats et les critères pris en compte par le juge pour déterminer l'hébergement d'enfants dont les parents sont éloignés géographiquement variera considérablement des débats ordinaires relatifs à l'hébergement des enfants ne se trouvant pas dans cette situation.4
Pour déterminer à quel parent sera confié l'hébergement principal de l'enfant, le juge aura égard à un certain nombre de facteurs et de critères spécifiques à la situation.
En tout état de cause, le tribunal devra examiner si le choix fait par l'un des parents de s'éloigner du lieu de vie habituel de l'enfant n’est pas contraire à l’intérêt de ce dernier.5
En outre, le juge vérifiera si la demande d'extradition du parent n'est pas prise sans tenir compte de l'intérêt de l'enfant.
Les raisons pouvant amener un parent à s’établir à l’étranger sont notamment : des raisons sentimentales6 (nouvelle relation amoureuse), retour au pays d'origine7, rapprochement de membres de la famille, pour des ambitions professionnelles, ou si ce choix est dicté pour des raisons impérieuses (état de santé par exemple).
A partir du moment où le déménagement ne met ni à mal le lien avec le père des enfants, ni le cursus scolaire des enfants, il doit être autorisé.
Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.
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1. Trib. jeun. Nivelles (5e ch.) n° 606 FAM 2010, 12 août 2011, Act. dr. fam. 2014 (reflet), liv. 5, 106, note OMRANI, F.
2. Loi du 18 juillet 2006 tendant à privilégier l'hébergement égalitaire de l'enfant dont les parents sont séparés et réglementant l'exécution forcée en matière d'hébergement d'enfant, M.B., 4 septembre 2006, p. 43971.
3. Doc. parl. Chambre, 2004-2005, 1673/014, p. 17.
4. N. MASSAGER, Droit familial de l'enfance : filiation, autorité parentale, hébergement, Bruxelles, Bruylant, 2009, pp. 559 et suivantes.
5. Civ. Nivelles, (jeun.), 7 juin 2010, R.G. n° 342.C.2009/5A.
6. Civ. Bruxelles, 3 juin 2013, R.G. n° 12/1504/C.
7. Bruxelles, (jeun.), 17 juillet 2008, R.G. n° 2007/JR/195.