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DROIT IMMOBILIER

VENTES IMMOBILIERES

3 Février 2016

Cour de cassation - Article 2262bis du Code civil

Cour de cassation - Article 2262bis du Code civil

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Présentation des faits1

En date du 16 juillet 2008, Monsieur B. a écrit à son notaire, maître L., pour l’informer qu’il vendait à Monsieur I. les terrains dont il était propriétaire, et que l’offre se fera avec une clause de préemption au nom de sa femme, Madame L.W. Il a par ailleurs indiqué au notaire que le prix a été convenu avec Monsieur I., et qu’il s’agit de 7.500 euros.

Monsieur B. a également écrit à Monsieur I., lui communiquant une copie de la lettre qu’il avait envoyée à son notaire.

Monsieur I. a introduit un pourvoi en cassation contre l’arrêt rendu le 7 janvier 2013 par la Cour d’appel de Liège. Il invoque la violation de l’article 149 de la Constitution, des articles 1134, 2262, 2262bis, §1er et 1589 du Code civil ainsi que l’article 1138, 4° du Code judiciaire.

Dans son jugement, la Cour d’appel de Liège a dit pour droit que l’offre faite par Monsieur B. n’avait pas été acceptée par Monsieur I., et ce jusqu’au 11 octobre 2010, date à laquelle l’offre a été retirée légitimement par Monsieur B.

Les juges d’appel ont considéré que Monsieur B. avait consenti une promesse unilatérale de vente à Monsieur I. en s’engageant à lui vendre des terrains déterminés pour un prix déterminé. La Cour d’appel a en outre jugé que cette offre était obligatoire pour le vendeur et ne devenait vente qu’à partir du moment où elle était acceptée par Monsieur I. Aucun délai n’avait par ailleurs été donné par Monsieur B. à Monsieur I. pour que celui-ci accepte l’offre.

L’offrant n’ayant en l’espèce pas fixé de durée concernant son offre, la Cour d’appel s’est référée au délai raisonnable. L’appréciation de ce délai est laissée au pouvoir souverain du juge, ce dernier prenant notamment en considération la complexité de la proposition et la nature du bien.

Toutefois, Monsieur I. s’est contenté d’affirmer qu’il y avait vente mais n’a pas apporté la preuve du moment auquel il aurait exprimé sa volonté de se porter acquéreur. Monsieur I. a, pour la première fois, déposé devant le premier juge en date du 25 janvier 2011, l’expression écrite de sa volonté d’accepter l’offre formulée par Monsieur B. Les juges d’appel ont constaé que l’offre émise par Monsieur B. avait été retirée le 11 octobre 2010, puisqu’à cette date une action en justice a été introduite, par laquelle il demandait la résolution de la vente, en argumentant qu’il n’y avait jamais eu de vente.

Les juges d’appel ont estimé, au vu des circonstances propres de l’espèce, qu’un délai de quelques semaines était suffisant pour que les candidats acquéreurs acceptent l’offre. Par conséquent, la Cour d’appel a décidé qu’au moment où Monsieur I. avait accepté l’offre, soit le 25 janvier 2011, Monsieur B. était délié de l’offre, et que dès lors il n’y avait pas eu de vente.

Dans son pourvoi en cassation, Monsieur I. considère que par application de l’article 1134 du Code civil, avant la levée de l’option, le promettant est définitivement lié et ne peut mettre fin au droit éventuel du bénéficiaire de l’option qu’avec l’accord de celui-ci.  

Monsieur I. invoque par ailleurs l’article 2262bis, 1er du Code civil pour estimer que lorsque l’offrant n’a pas fixé de durée à sa promesse, le droit du bénéficiaire de la promesse de lever l’option se prescrit par dix ans.

Décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation commence par constater qu’effectivement conformément à l’article 2262bis, §1er, alinéa 1er, du Code civil, le droit du bénéficiaire de la promesse de contrat de lever l’option se prescrit, en principe, par dix ans lorsqu’aucun délai n’est fixé dans la promesse.

Toutefois, il est possible que le juge déduise de la volonté des parties que l’offre a été consentie pour un délai inférieur au délai de prescription.

En effet, Monsieur I. n’apporte pas la preuve du moment auquel il aurait accepté l’offre, à part dans les conclusions devant le premier juge en date du 25 janvier 2011.

En considérant que la promesse de vente portait sur trois terrains bien identifiés « pour un prix qui ne nécessite pas de gros mouvements de trésorerie de sorte qu’un délai de quelques semaines était suffisant pour que les (demandeurs) prennent position, ce qu’ils n’ont pas fait », les juges d’appel ont légalement justifié leur décision de dire que les défendeurs étaient déliés de la promesse de vente de leur auteur.

Bon à savoir

La promesse de vente peut être définie comme étant un engagement unilatéral du propriétaire d’un bien immobilier qui promet de vendre ledit bien à un candidat-acheteur.  Dans ce cas, seul le vendeur s’engage par sa promesse, mais pas l’acheteur2.

Il est important de préciser que la vente n’est formée que lorsque l’option d’achat est levée par le bénéficiaire, et pas avant3. En effet, avant la levée de l’option, le bénéficiaire de la promesse ne possède aucun droit sur l’immeuble.

Quant à la durée de la promesse de vente, il convient de distinguer deux situations4. En effet, il se peut qu’une durée ait été prévue dans la promesse de vente. Dans ce cas, le promettant est lié par son offre pendant le délai5, et le droit du bénéficiaire prendra automatiquement fin avec la réalisation du terme6.

Lorsqu’aucune durée n’a été précise, le principe du délai raisonnable trouvera à s’appliquer. Dans ce cas, le promettant peut mettre en demeure7 le bénéficiaire de lever ou de renoncer à l’option d’achat dans un délai raisonnable, dont la durée est fonction du cas d’espèce8

Même s’il est vrai que le droit du bénéficiaire de la promesse de contrat de lever l’option se prescrit, conformément à l’article 2262bis du Code civil, par dix ans lorsqu’aucun délai n’est prévu dans la promesse de vente, l’intention des parties peut parfois amener le juge à déduire des circonstances que la promesse a en réalité été consentie pour une durée inférieure à dix ans.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

_______________

 

1. Cass., 26 mai 2014, Pas., 2014, p. 1292.

2. L. OLIVIER, B. MARISCAL, V. BRUSSELMANS, J-P. LEGRAND et N. LATRAN, L’immobilier en pratique 2015-2016, Wolters Kluwer Belgium, 2015, p. 496.

3. Cass., 7 octobre 1935, Pas., 1935, I, p. 355.

4. P.-A. FORIERS, « Option, promesse de vente, vente et incertitude sur l’identité de l’acquéreur », in Le patrimoine immobilier familial, -Aspects civils et fiscaux, Louvain-la-Neuve, Anthémis, 2009, p. 7.

5. P. HARMEL, « Théorie générale de la vente », Rép. not., t. VII, Bruxelles, Larcier, 1985, p. 123.

6. M. BERLINGIN., « La formation dynamique du contrat de vente », in Vente. Commentaire pratique, Kluwer, Waterloo, 2009, I.2-1 - I.2-48 ; P. HARMEL, « Théorie générale de la vente », Rép. not., t. VII, Bruxelles, Larcier, 1985, p. 125.

7. Gand, 17 mai 1996, T.R.V., 1996, p. 406.

8. C. DELFORGE, « L’offre de contracter et la formation du contrat », R.G.D.C., 2005, p. 6, n°5.