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DROIT IMMOBILIER

VENTES IMMOBILIERES

25 Octobre 2016

Cour de cassation - Pacte de préférence

Cour de cassation - Pacte de préférence

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Présentation des faits1

Par acte sous seing privé du 10 avril 1961, Madame L. a promis de vendre l’immeuble à Monsieur V. et ce dernier de lui acheter au prix convenu entre eux, sous la condition suspensive expresse que le locataire, Monsieur H., ou, éventuellement l’occupant, Monsieur G. (à raison d’une cession de bail consentie par Monsieur H.) ne fasse usage du droit de préférence inséré dans le bail.

La SA B. prétend exercer un droit de préférence pour l’avoir acquis le 26 avril 1961, de Monsieur G., que Monsieur V. et autres contestent. Elle les a alors cités en justice.

Par arrêt du 4 février 1969, la Cour d’appel de Liège a considéré qu’il ne pouvait pas se prévaloir de la cession du droit de préférence, étant donné qu’il aurait été consenti à Monsieur G. en considération de sa personne, par déclaration conjointe de Madame L. et Monsieur V. sans accord de Monsieur G.

La SA B. a alors interjeté appel dudit arrêt.

Décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation rappelle tout d’abord que le pacte de préférence n’étant pas par nature un contrat intuitu personae, seule la volonté expresse ou tacite peut lui conférer ce caractère. Dès lors, le bénéficiaire d’un droit de préférence peut le céder, sauf s’il a été convenu entre parties que ce droit lui aurait été conféré en considération de sa personne.

La Cour recherche ensuite la commune intention de Madame L. et de Monsieur V.

Il ressort en l’espèce que ceux-ci ont voulu de commun accord laisser la préférence à Monsieur H. en sa qualité de locataire principal auquel le bail accordait cette préférence et, à son défaut, à Monsieur G., celui qui depuis longtemps avait secondé le locataire principal dans l’accomplissement de ses obligations envers Madame L., propriétaire.

Cette attribution du droit de préférence à Monsieur G., en sa qualité d’occupant, n’a été, dans l’intention de Madame L. et de Monsieur V., consentie qu’à titre de faveur intuitu personae, au moment même de la signature de l’acte sous seing privé du 10 avril 1961.

Ainsi, Monsieur G., qui n’était pas partie à cet acte, est devenu le bénéficiaire d’un droit de préférence par l’effet d’une déclaration de volonté unilatérale et conjointe de Madame L. et de Monsieur V., lui accordant cette faveur intuitu personae, sans avoir marqué son accord au sujet de cette modalité à laquelle ladite faveur était nécessairement subordonnée.

La Cour considère que Monsieur G., bénéficiaire d’un droit de préférence qui lui a été accordé unilatéralement et à titre de faveur intuitu personae par les parties à l’acte du 10 avril 1961 n’est dès lors pas fondé à se prévaloir, à l’encontre de la commune intention desdites parties du caractère cessible selon lui, suivant le droit commun du droit de préférence.

Par conséquent, la Cour de cassation rejette le pourvoi en cassation introduit par la SA B. et la condamne aux dépens.

Bon à savoir

Le droit de préemption, aussi appelé pacte de préférence, peut être défini comme le droit reconnu à une personne lui permettant d’avoir priorité sur tout autre candidat, en cas de mise en vente du bien immobilier.2

En d’autres termes, s’il y a un droit de préemption, le titulaire aura la préférence pour conclure la vente aux mêmes conditions que celles proposées par le tiers.3

La différence de vocable utilisé s’explique par le fait que le droit de préférence est de nature contractuelle, tandis que le droit de préemption est institué par la loi.4

Il est important de noter que le droit de préférence n’est pas considéré comme étant conclu intuitu personae. Dès lors, ce droit est, en principe, toujours cessible, sauf si les parties ont stipulé expressément le contraire. Si cession il y a, il y aura lieu de tenir compte du prescrit de l’article 1690 du Code civil afin que cette cession soit opposable au propriétaire.5

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque. 

_______________

1. Cass., 19 février 1970, Jurisprudence de Belgique, p. 542.

2. Voyez : E. BEGIUN, « Droit de préemption : quelques réflexions liées à la pratique notariale », Rev. dr. rur. , 2003, pp. 85 et suivantes.

3. M. VANWIJCK-ALEXANDRE et S. BAR, « Le pacte de préférence ou le droit de conclure par priorité », in Le processus de formation du contrat, Coll. Commission Université-Palais, vol. 72, Bruxelles, Larcier, 2004, pp. 133 et suivantes.

4. E. BEGUIN., « Le droit de préemption », in Guide de droit immobilier, Wolters Kluwer Belgium, Waterloo, 2013, VI.1.11.0. – 1 ; C. SAINT-ALARY-HOUIN, Le droit de préemption, Paris, L.G.D.J., 1979, p. 7 ;  Cass., 19 février 1970, Pas., 1970, I, p. 542; Cass., 24 janvier 2003, Pas., 2003, I, p. 186; Cass., 27 avril 2006, Pas., 2006, I, p. 976.

5. Cass., 19 février 1970, Pas., 1970, I, p. 542 ; M. VAN MOLLE., « Droit de préférence: aspects civils et fiscaux », Rec. gén. enr. not., 2014, liv. 8, pp. 346-353 ; Cass., 30 janvier 1965, R.C.J.B., 1966, p. 77, note J. DABIN.