Les conflits entre actionnaires
L'exclusion et le retrait conventionnels (3/6)
Bien que le législateur ait inséré dans le Code des sociétés les actions judicaires d’exclusion et de retrait, le recours à ces mécanismes conventionnels n’a pas perdu son intérêt. En effet, ils permettent aux actionnaires d’élaborer des modes de résolution des conflits qui correspondent à leurs besoins et aux besoins de la société. Il peut s’agir d’éviter les coûts, la lourdeur et la publicité nuisible liés à une procédure judiciaire ou encore de pouvoir fixer au préalable le prix des actions ou des parts sociales qui seront transmises 6.
La possibilité de prévoir des mécanismes conventionnels n’est pas entravée par l’existence des recours judiciaires. Au contraire, ces derniers devant intervenir subsidiairement, le législateur donne la priorité aux modes de résolution établis par les actionnaires. Par contre, les mécanismes conventionnels ne peuvent entraver les recours judiciaires qui revêtent un caractère impératif. Cela signifie que les clauses qui prévoient ces mécanismes sont valables pour autant qu’elles ne suppriment ou ne modalisent pas le recours au juge et les conditions qui y sont liées 7.
En pratique, on a souvent à faire à des clauses de call et put options. La clause de call option prévoit qu’un actionnaire s’engage à vendre ses titres à un autre actionnaire qui bénéficie d’une option d’achat. La clause de put option accorde à un actionnaire une option de vente qui lui permet de forcer le rachat de ses titres par un actionnaire qui a consenti une promesse d’achat. Ces deux mécanismes s’apparentent respectivement à des actions en exclusion et en retrait lorsqu’ils ont pour objectif de résoudre un conflit par le départ d’un actionnaire 8.
Dans un esprit un peu différent, on trouve les clauses américaines. Également basées sur un système d’offres et d’options, ces clauses ne permettent néanmoins pas de savoir avec certitude lequel des actionnaires sera contraint de céder ses titres et dans quelles conditions. Il en existe plusieurs variétés qui reposent toutes sur un double objectif. D’une part, elles sont dissuasives et mettent ainsi en place un « équilibre de la terreur » 9 de par le caractère aléatoire de la résolution du conflit. D’autre part, elles mettent un terme au litige en jouant le rôle d’action en exclusion ou en retrait.
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6. O. Caprasse et R. Aydogdu, Les conflits entre actionnaires : prévention et résolution, Bruxelles, Larcier, 2010, p. 90.
7. E. Pottier et A. Coibion, « Le règlement des conflits entre actionnaires : exclusion, retrait et modes alternatifs de résolution des conflits », in Guide juridique de l’entreprise, 2ème édition, Titre II, Livre 28, Bruxelles, Kluwer, 2001, n° 490, p. 48.
8. O. Caprasse et R. Aydogdu, op. cit., p. 94.
9. S. Prat, Les pactes d’actionnaires relatifs au transfert de valeurs mobilières, Paris, Litec, 1992, n° 154, p. 91.