La procédure d’expropriation
La procédure d'expropriation
L'expropriation se déroule selon une procédure qui se décompose en deux phases successives. Dans un premier temps, il s'agit de la phase administrative, durant laquelle l'autorité publique va décider de poursuivre une expropriation. À l'issue de la phase administrative, prend place la phase judiciaire visant à obtenir un jugement d’expropriation1.
La phase administrative débute par l’élaboration d’un projet comprenant un plan de parcelles à exproprier ainsi que l'identité des propriétaires2.
Ensuite, ce projet d’expropriation est déposé à la maison communale du lieu du bien à exproprier. Lors des cette phase, les propriétaires de l’immeuble et ceux des immeubles voisins sont avertis et peuvent, le cas échéant, faire des observations ou réclamations. Il s’agit de la phase d’enquête et d’avertissement3.
Lorsque l’enquête est terminée, une décision sera rendue par les Autorités, à savoir, un décret d’expropriation. Il est utile de préciser que ce décret ne vaut pas expropriation. En effet, il revient aux juridictions judiciaires de se prononcer quant à ce. En outre, ce décret d’expropriation doit faire l’objet d’une motivation4.
Le décret d’expropriation est un acte administratif de sorte qu’il peut faire l’objet d’un recours en annulation devant la Cour constitutionnelle ou devant le Conseil d’Etat5.
Quoi qu’il en soit, lors de la phase administrative, si les parties se mettent d'accord, la procédure peut prendre fin par la signature d'une convention de cession amiable. Effectivement, avant l’introduction d’une procédure judiciaire en expropriation, il faut qu’il y ait eu une offre de cession amiable6. Autrement dit, l’autorité expropriante doit prouver au juge qu’elle a essayé d’acquérir l’immeuble par la voie amiable.
En cas de désaccord entre les propriétaires de l’immeuble et l'autorité expropriante, cette dernière peut introduire une procédure judiciaire.7
Lors de la phase judiciaire ordinaire d’expropriation8, l’autorité présente son décret d’expropriation au juge et demande que soit prononcé un jugement d’expropriation9.
L’autorité expropriante dépose et communique un dossier administratif au greffe du tribunal de première instance. Ensuite, l’autorité expropriante va citer en justice les propriétaires et usufruitiers afin qu’ils comparaissent devant le tribunal.
Après avoir procédé à un contrôle juridictionnel10, le juge rendra un jugement. Ce jugement peut soit débouter l’autorité expropriante de sorte qu’il n’y aura pas expropriation. Soit, il considère que la demande remplit les conditions et il rendra un jugement d’expropriation. Ce jugement peut faire l’objet d’un appel.
Le jugement prononçant l’expropriation ne détermine que rarement le montant des indemnités allouées aux personnes expropriées. Effectivement, des indemnités seront allouées en vue de réparer intégralement le dommage causé aux propriétaires par l'expropriation11. Le problème qui peut survenir pour les propriétaires est de démontrer l'étendue du dommage et le lien de causalité entre ce dommage et l'expropriation12.
Pour déterminer le montant des indemnités, le juge désigne des experts et demande qu’il y ait une visite des lieux. Ces experts rendront un rapport au juge, qui ne lie toutefois pas ce dernier13.
Un second jugement sera rendu et portera sur les indemnités14. Ce jugement doit être rendu dans les trente jours suivant le dépôt du rapport par les experts et peut faire l’objet d’un appel.
Enfin, une ordonnance d’envoi en possession sera prononcée et signifiée ce qui implique que l’exproprié n’a plus le droit d’occuper l’immeuble. A défaut de quitter les lieux, l’exproprié pourrait être tenu de verser des dommages et intérêts au nouveau propriétaire, et ce, pour occupation des lieux sans titre, ni droit15.
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1. J. COPPEE., « La procédure d'expropriation », in Expropriations, La Charte, Bruges, 1997, p. 13 et suivantes.
2. J.P. Bruges, 1er juillet 1998, C.D.P.K., 1999, p. 129.
3. E. Causin, Droit des victimes d'expropriation et d'autres privations de propriété, Limal, Anthemis, 2011, p. 136.
4. Loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs.
5. C.E., 24 juin 1993, Leiebos et Vandoorne, arrêt n°43.456, V.A.R.S.
6. Voyez l’article 1er de la loi du 17 avril 1835.
7. Voyez : D. LAGASSE, « L’expropriation d’un bien pour cause d’utilité publique n’est pas toujours urgente », J.T., 2008, liv. 6311, 335-336.
8. M. KAISER., « La procédure ordinaire: la règle devenue exception confirmée », in L'expropriation pour cause d'utilité publique, Bruylant, Bruxelles, 2013, p. 273 et suivantes.
9. Une phase d’extrême urgence est également possible et prévue légalement. Cette procédure fera l’objet d’un autre abrégé juridique.
10. Cass., 8 mars 1979, Pas., 1979, I, p. 814.
11. Cass., 20 septembre 1979, J.T., 1979, p. 116.
12. D. LAGASSE., « Les principes généraux en matière d'indemnités d'expropriation », Rev. not., 2012/10, n° 3068, p. 743-775.
13. Article 9ter de la loi du 17 avril 1835.
14. T. MINNE-DORSIMONT, A. GRÉGOIRE, « Indemnités et procédure d'expropriation - Jurisprudence actuelle », Recension de A.T.D.F, n° 6, 1979, p. 55.
15. E. Causin, Droit des victimes d'expropriation et d'autres privations de propriété, Limal, Anthemis, 2011, p. 166.