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DROIT IMMOBILIER

Abrégés juridiques

23 Aout 2016

Le droit à la commission de l’agent immobilier

Le droit à la commission de l'agent immobilier

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En vertu de l’article 2 de l’arrêté royal du 12 janvier 2007 relatif à l’usage de certaines clauses dans les contrats d’intermédiaire d’agent immobiliers1, certaines clauses doivent obligatoirement figurer dans tout contrat d’intermédiaire de vente, d’achat ou de location conclu entre un agent immobilier et un consommateur. Le contrat de courtage doit notamment contenir « le tarif à payer par le consommateur pour la mission d'intermédiation »2. Ce tarif doit tenir compte de la complexité de la mission de l’agent immobilier et des frais relatifs à son activité3.

En principe, la commission de l’agent immobilier ne lui est due que si le contrat de vente conclu grâce à son intervention est parfait4. Lorsque la vente est conclue sous condition suspensive5, il est nécessaire que toutes les conditions suspensives éventuelles soient au préalable levées.

En pratique, plusieurs difficultés peuvent toutefois se poser et la situation n’est pas aussi simple qu’elle n’y paraît.

Que se passe-t-il lorsque le bien est vendu postérieurement à l’expiration du contrat de courtage ? Quid lorsque le bien est vendu à un acquéreur mis en contact par l’agent immobilier mais après que le propriétaire mette fin à la convention de courtage ? L’agent immobilier conserve-t-il son droit à la commission lorsque la vente ne se réalise pas ?

Le paiement de la commission lorsque le bien est vendu après l’expiration de la mission

Conformément à l’article 2,7° de l’arrêté royal précité, en cas de conclusion du contrat de vente par le propriétaire après l’expiration du contrat de courtage, l’agent immobilier n’aura droit au paiement de sa commission que si certaines conditions sont remplies, à savoir :

-       L'agent immobilier a donné à l'autre partie (…) une information précise et individuelle ;

-       Le contrat d'intermédiaire stipule que l'agent immobilier transmet au consommateur dans les sept jours ouvrables suivant la fin du contrat d'intermédiaire, la liste des personnes à qui il a donné une information précise et individuelle ;

-       Le consommateur conclut le contrat avec une de ces personnes ou avec les personnes qui sont dans une relation avec celles-ci telle qu'il est raisonnable d'admettre qu'elles disposaient de l'information donnée suite à cette relation ;

-       Le contrat est conclu par le consommateur dans les six mois qui suivent la fin du contrat d'intermédiaire6.

En ce qui concerne la liste des personnes que l’agent immobilier est tenu de transmettre au propriétaire, celle-ci ne peut pas être anormalement longue, puisqu’il doit s’agir de personnes auxquelles l’agent immobilier a fourni une information précise et individuelle. C’est pourquoi, le tribunal de première instance de Tournai a considéré que la communication d’une liste de six cents noms, sans aucun autre commentaire qu’un numéro de téléphone, ne suffisait pas pour remplir les conditions de l’article 2, 7° précité7.

La commission lorsque la vente échoue

La vente peut échouer principalement pour deux raisons :

-       Soit parce que l’acheteur est défaillant,

-       Soit parce que le vendeur ne souhaite plus vendre8.

Il est fréquent, en pratique, que l’agent immobilier trouve un acquéreur, que le contrat de vente soit conclu, mais que l’acquéreur soit finalement défaillant. Dans cette situation, l’agent immobilier, estimant que sa mission a été remplie, demandera le paiement de sa commission.

La Cour de cassation a eu l’occasion de se pencher sur la question dans un arrêt rendu le 27 mai 20109. La Cour a notamment rappelé qu’en vertu de l'article 1134 du Code civil, le droit au courtage trouvait son origine dans la convention de courtage et non dans le contrat conclu à l'intervention du courtier. La Cour a considéré que :

« La circonstance que le contrat conclu à l'intervention du courtier reste sans exécution ou que ce contrat est résolu aux torts d'une des parties à ce contrat ne prive pas, en règle, le courtier du droit au courtage convenu »10.

Dès que l’agent immobilier a réalisé la mission qui lui avait été confiée, et a trouvé un acquéreur pour le prix demandé, il a droit au paiement de sa commission. Si l’acheteur se révèle défaillant par la suite, cette circonstance n’entache en rien son droit à réclamer le paiement de sa rémunération11

Si la défaillance de l’acheteur était prévisible, les choses sont moins claires. La mission de l’agent immobilier est en effet de trouver un acheteur capable de payer. L’article 55 du Code de déontologie oblige l’agent immobilier à se renseigner sur la capacité et la fiabilité de l’acquéreur potentiel « dans la mesure des moyens dont il dispose pour ce faire »12. Si l’incapacité de payer l’acquéreur était prévisible, l’agent immobilier n’a par conséquent pas réalisé sa mission et n’a pas droit au paiement de sa rémunération.

Il arrive également que la vente échoue parce que le vendeur ne souhaite plus vendre. Précisons d’emblée que le propriétaire reste bien entendu libre de vendre ou non, mais qu’il assume toute de même une certaine responsabilité envers l’agent immobilier, s’il retire son bien de la vente et que l’agent immobilier n’a commis aucune faute13. Dans une telle hypothèse, il conviendra de voir si le refus du propriétaire est raisonnablement justifié ou pas. Dans la négative, l’agent immobilier pourra prétendre au paiement de sa commission14.

Enfin, prenons à titre exemple un arrêt récent de la Cour de cassation. Dans cette affaire, la clause suivante avait été insérée dans le contrat de courtage : « le droit à la commission est exigible uniquement en cas de réalisation parfaite de sa mission », la mission étant de « trouver un amateur, par l’obtention de celui-ci d’une offre d’achat écrite, ferme et définitive pour l’acquisition du bien désigné ». Le contrat précisait cependant que « cette commission sera payable au comptant et sera perçue sur l’acompte lors de la signature du compromis de vente »15. En l’espèce, l’offre d’achat n’avait pas été suivie d’un compromis. Cette situation peut par exemple se présenter lorsqu’il devient impossible de signer le compromis en raison de la non-réalisation d’une condition suspensive.

La Cour d’appel de Bruxelles, dans son arrêt du 11 octobre 2013, avait estimé que l’offre d’achat émise par l’acquéreur était « ferme, irrévocable et sans réserve », et que partant, l’acceptation par le propriétaire valait vente, indépendamment de la signature du compromis. Les juges d’appel avaient dès lors condamné les propriétaires à payer la commission à l’agent immobilier. La Cour de cassation a, dans un arrêt rendu le 22 janvier 2016, rejeté ce moyen en cassation. 

Il ne faut en effet pas confondre la naissance du droit à la commission et le moment où, une fois née, celle-ci devra être payée16.

__________________________

1. M.B., 19 janvier 2007, entré en vigueur le 1er février 2007.

2. Article 2, 2° de l’arrêté royal du 12 janvier 2007 relatif à l’usage de certaines clauses dans les contrats d’intermédiaire d’agent immobiliers, M.B., 19 janvier 2007, entré en vigueur le 1er février 2007.

3. J. Vansteene, « Agents immobiliers. Quels tarifs ? », Immobilier, 2004, liv. 10, pp. 3-4.

4. L. Collon, Le statut juridique de l’agent immobilier, 2e édition, Larcier, 2008, n° 163.

5. Voy. Liège, 13 juin 1994, R.G.E.N., 1996, p. 198 ; Liège, 27 mars 2003, RG n° 2001/RG/60, www.juridat.be; Civ. Hasselt, 17 juin 2002, R.A.B.G., 2004, liv. 7, p. 443, cités dans G. Carnoy, « Le droit à la commission de l’agent immobilier quand la vente échoue », 11 février 2016 (accessible sur : http://gillescarnoy.be, consulté le 27 avril 2016).

6. Article 2, 7° de l’arrêté royal du 12 janvier 2007 relatif à l’usage de certaines clauses dans les contrats d’intermédiaire d’agent immobiliers, M.B., 19 janvier 2007, entré en vigueur le 1er février 2007.

7. Civ. Tournai, 7 février 2013, J.T., 2013/21, p. 404. Pour une analyse plus détaillée de cet arrêt, voy. également G. Carnoy, « La commission ‘post contrat’ de l’agent immobilier », 8 juin 2013 (accessible sur : http://gillescarnoy.be, consulté le 26 avril 2016).

8. Bruxelles, 18 septembre 2002, Res et jura imm., 2003, p. 330.

9. Cass., 27 mai 2010, R.C.D.I., 2010, liv. 4, p. 23. Pour une analyse détaillée de l’arrêt, voy. G. Carnoy, « La commission de l’agent immobilier lorsque la vente avorte », 27 août 2010 (accessible sur : http://gillescarnoy.be, consulté le 27 avril 2016).

10. Cass., 27 mai 2010, R.C.D.I., 2010, liv. 4, p. 23.

11. G. Carnoy, « La commission de l’agent immobilier lorsque la vente avorte », 27 août 2010 (accessible sur : http://gillescarnoy.be, consulté le 27 avril 2016).

12. Article 55 du Code de déontologie de l’Institut professionnel des agents immobiliers, M.B., 14 septembre 2006, entré en vigueur le 17 décembre 2006.

13. G. Carnoy, « La commission de l’agent immobilier lorsque la vente avorte », 27 août 2010 (accessible sur : www.gillescarnoy.be, consulté le 27 avril 2016).

14. Ibidem.

15. Cass. (1ère ch.), 22 janvier 2016, rôle n° C.14.0410.F., www.juridat.be.

16. G. Carnoy, « Le droit à la commission de l’agent immobilier quand la vente échoue », 11 février 2016 (accessible sur : http://gillescarnoy.be, consulté le 27 avril 2016).