Les droits successoraux du conjoint survivant
La nature et l'étendue des droits successoraux du conjoint survivant (3/7)
Lorsque le conjoint décédé n'a pas fait de libéralité, le conjoint survivant sera un héritier légal. La particularité des droits successoraux du conjoint survivant est qu'il héritier en usufruit. Cet usufruit repose sur toute la succession lorsqu'il entre concours avec des descendants. Tandis que l'usufruit repose sur le patrimoine du défunt lorsque le conjoint survivant entre en concours avec d'autres héritiers que les descendants. 7
La raison pour laquelle le législateur a mis en place des droits successoraux en usufruit est de de permettre au conjoint survivant de perpétuer le train de vie qu'il avait avec son conjoint avant que celui-ci ne décède. 8
Ces droits varient en fonction des successibles avec qui il entre en concours. 9
Lorsque le conjoint survivant entre en concours avec les descendants du de cujus, celui-ci recueillera l'usufruit de toute la succession. Les descendants seront, quant à eux, nu-propriétaires. 10
Bien évidemment, pour que le conjoint survivant soit en concours avec des descendants, il faut que ceux-ci n'aient pas renoncé 11 à la succession ou soient considérés comme indignes d'un point de vue successoral. Il est important de souligner que les droits successoraux du conjoint survivant ne varient pas selon que les descendants du défunt soient ou non ses enfants.
Lorsque le conjoint survivant entre en concours avec d'autres héritiers que les descendants du défunt, (2e, 3e ou 4e ordre), il va recueillir la part du défunt dans la communauté en pleine propriété et l'usufruit sur le patrimoine propre du de cujus. 13
A cet égard, il faut distinguer deux situations 14:
- Si le régime matrimonial des époux était une communauté (légale, universelle ou modalisée), il y a aura lieu de procéder à la liquidation du régime matrimonial avant de procéder aux règles du droit des successions. Ainsi, le conjoint survivant aura en pleine propriété sa part dans la communauté, mais également celle de son époux dans la communauté. Par contre, le conjoint survivant exercera un usufruit sur le patrimoine propre du défunt.
- Si le régime matrimonial ne prévoit pas une communauté (séparation de bien), certains biens peuvent être indivis entre les époux. Dans ce cas, le conjoint survivant garde sa part dans le bien indivis et obtient l'usufruit sur la part indivise de son époux décédé.
Enfin, lorsque le conjoint survivant est le seul héritier car le défunt ne laisse derrière lui aucun successible, le conjoint survivant recueillera la totalité de la succession en pleine propriété. 15
Cette hypothèse peut se présenter dans plusieurs situations. Premièrement, lorsqu'il n'y a plus aucun parent en vie au-delà du quatrième degré. Deuxièmement, lorsque le de cujus a des enfants mais qu'ils n'ont pas été reconnus par celui-ci. Troisièmement, lorsque des parents/descendants pourraient hériter car ils sont en degré utile mais qu'ils ont renoncé à la succession 17.
Par conséquent, il est utile de préciser que ni l'Etat, ni le CPAS, n'excluent le conjoint survivant dans la succession de son époux défunt. 18
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7. A.-C. Van Gysel, « La dévolution successorale », in Précis du droit des successions et des libéralités, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 58.
8. L. Raucent, Les droits du conjoint survivant : Premier commentaire de la loi du 14 mai 1981, Swinnen, 1981, pp. 100 et suivantes.
9. Article 745bis du code civil.
11. Article 785 du Code civil.
12. Article 727 du Code civil.
13. Article 745bis, § 1er, alinéa 2 du code civil.
14. A.-C. Van Gysel, « La dévolution successorale », in Précis du droit des successions et des libéralités, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 63.
15. Article 745bis du Code civil.
16. Article 727 du Code civil. Et voyez : F. Taonmont, « Premier volet de la réforme du droit successoral la loi du 10 décembre 2012 relative à l'indignité successorale, la résolution des donations, la déchéance des avantages matrimoniaux et la substitution », R.T.D.F., 3/2013, p. 659.
17. Article 785 du Code civil.
18. Article 768 du Code civil, Cass., 28 mars 1952, Pas., 1952, I, p. 483.