Le tribunal de l'application des peines
La procédure devant le TAP (3/3)
1) En ce qui concerne les condamnés à des peines privatives de liberté de trois ans ou moins
Le condamné doit adresser une demande écrite d’octroi de la modalité d’exécution de la peine au greffe du tribunal de l’application des peines ou au greffe de la prison s’il y est détenu.
Le greffe transmet la demande dans les 24 heures au greffe du tribunal de l'application des peines et en remet une copie au directeur de la prison (cas du détenu) et celui-ci doit rendre un avis dans les deux mois de la réception de la copie de la demande (articles 31 et 32 de la loi sur le statut externe);
Il ne faut pas qu’il y ait de contre-indications. Celles-ci portent sur :
- Le fait que le condamné n’a pas la possibilité de subvenir à ses besoins ;
- Le risque manifeste pour l’intégrité physique des tiers ;
- Le risque que le condamné importune les victimes ;
- L'attitude du condamné vis-à-vis des victimes de l’infraction commise.
2) En ce qui concerne le condamné à des peines privatives de libertés de plus de trois ans
La demande écrie du condamné est adressée au greffe de la prison.
Le greffe de la prison transmet la demande au greffe du tribunal de l’application des peines dans les 24 heures et en remet une copie au directeur 25. Et, le directeur rend un avis dans les deux mois de la réception de la copie de la demande.
Il ne faut pas qu’il y ait des contre-indications 26. Celles-ci portent sur :
- l’absence de perspectives de réinsertion sociale du condamné;
- le risque de perpétration de nouvelles infractions ;
- le risque que le condamné importune les victimes ;
- l’attitude du condamné vis-à-vis des victimes de l’infraction commise ;
3) L’avis du directeur de prison
Cet avis demeure très important dans le cadre de la procédure suivie. Cet avis est rendu d’office en matière de libération conditionnelle et en matière de d’octroi de la mesure de liberté provisoire en vue de l’éloignement du territoire ou de la remise 27. L’avis est rendu au plus tôt quatre mois et au plus tard deux mois avant la date d’admissibilité à la libération conditionnelle ou provisoire.
L’avis peut être rendu au moment fixé par le jugement intervenu et qui refusait l’octroi de la modalité demandée, en cas de réexamen du dossier.
Pour pouvoir rédiger son avis, le directeur entend le condamné en vue d’établir son rapport 28.
Cet avis du directeur contient une proposition motivée d’octroi ou de refus de la modalité d’exécution de la peine, et le cas échéant, les conditions particulières que le directeur estime nécessaire d’imposer au condamné 29.
4) L’avis du Ministère public
L’article 51 de la loi sur le statut externe prévoit que le Procureur du Roi doit rédiger un avis motivé dans le mois de la réception de l’avis du directeur 30. Le Procureur du Roi transmet son avis au greffe du tribunal de l’application des peines et en communique une copie au condamné et au directeur 31.
5) L’audience
L’audience a lieu dans les deux mois de la réception de l’avis écrit du ministère public, dit l’article 52, § 1er de la loi sur le statut externe 32.
Le condamné, le directeur et la victime sont convoqués à l’audience par pli judiciaire. Et, le dossier est tenu à la disposition du condamné et de son conseil quatre jours avant la date fixée pour l’audience, au greffe de la prison. Le condamné peut en prendre copie, gratuitement 33.
Lors de l’audience, le condamné est tenu de comparaître devant le tribunal, et ne peut pas s’y faire représenter par un avocat 34.
A la différence du condamné, la victime peut se faire assister par un avocat, mais peut également s’y faire simplement représenter par son avocat, ou encore par le délégué d’un organisme public ou d’une association agréée à cette fin par le Roi 35.
L’audience se déroule à huis clos. Les débats sont contradictoires.
Et, si elle le désire, la victime sera entendue sur les conditions particulières qui sont proposées, ce, dans son intérêt.
Le tribunal peut décider d’entendre encore d’autres personnes.
6) Le jugement du tribunal de l’application des peines
Le jugement rendu doit être motivé. Il est rendu dans les quatorze jours de la mise en délibéré, et est prononcé en audience publique 36.
7°/ Les voies de recours ouvertes à l’encontre du jugement du tribunal d’application des peines :
Les décisions du tribunal d’application des peines sont susceptibles de faire l’objet d’un pourvoi en cassation 37. Le pourvoi dirigé contre une décision d’octroi d’une modalité d’exécution de la peine a un caractère suspensif 38.
Par contre, le pourvoi dirigé contre un jugement qui refuse l’octroi d’une modalité, qui la révoque ou qui en revoit les conditions particulières n’est pas suspensif.
La Cour de cassation statue dans les trente jours à compter du pourvoi 39.
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24. Article 49 de la loi sur le statut externe (les articles 31 et 32 précités s’appliquent).
25. Article 47 de la loi sur le statut externe.
26. Article 50 de la loi sur le statut externe ; et voyez les développements à ce sujet exposés par H.D. Bosly et alii, op. cit., p. 1378 et suiv. : « Le directeur est tenu de constituer un dossier comprenant : une copie de la fiche d’écrou (document qui mentionne les condamnations qui sont en cours d’exécution ainsi que le résultat du calcul des dates d’admissibilité aux modalités d’exécution de la peine), une copie des jugements et arrêts, l’exposé des faits pour lesquels la personne a été condamnée, tel qu’établi par le Ministère public ; un extrait du casier judiciaire, la date d’admissibilité à la modalité d’exécution de la peine concernée, le rapport du directeur, l’avis motivé d’un service ou d’une personne spécialisée dans l’expertise diagnostique des délinquants sexuels, les remarques de la conférence du personnel, si le condamné a demandé à être entendu par cette instance, le cas échéant, le mémoire du condamné ou de son conseil, s’ils choisissent d’en déposer un » ; le rapport du directeur (ce rapport proprement dit « contient l’analyse que le directeur a faite de la situation personnelle du condamné au regard de la mesure d’exécution de la peine qui est à l’examen ». « Cette analyse porte sur les conditions de temps et de fond que la loi attache à cette mesure, sur l’analyse des contre-indications, sur l’évaluation du plan de reclassement social et sur les moyens de rencontrer les contre-indications. Pour les condamnés étrangers, l’avis porte sur la situation de séjour et les modalités d’éloignement qui seront imposées par l’Office des Etrangers »).
27. Article 2, alinéa 3 de l’arrêté royal du 29 janvier 2007 déterminant le contenu du rapport du directeur et déterminant la composition et le fonctionnement de la conférence du personnel, voyez les développements à cet égard in H.D. Bosly, op. cit.
28. Article 31, § 3 de la loi sur le statut externe.
29. Cass., 23 avril 2008, RG P.08.0486.F cité par H.D. Bosly, op. cit., p. 1382, ce délai n’est pas prescrit à peine de nullité du jugement. Ces auteurs estiment qu’à défaut pour le Procureur du Roi d’avoir transmis son avis dans le délai fixé par la loi, il doit rendre son avis par écrit avant ou au plus tard pendant l’audience.
30. H.D. Bosly, op. cit.
31. Cass., 31 juillet 2007, Pas., 2007, n° 374, Rev.dr.pén.crim., 2008, p. 146 ; cass., 22 juillet 2008, Pas., 2008, n° 426 cités par H.D. Bosly et alii, op. cit., p. 1382 et voyez les autres références y mentionnées : ce délai est un délai d’ordre, et qui n’est pas prescrit à peine de nullité du jugement.
32. Circulaire ministérielle n° 1794 du 7 février 2007 relative au statut externe du condamné, p. 39, cité par H.D. Bosly, op. cit., p. 1383.
33. La cour constitutionnelle a estimé qu’il y avait en l’occurrence violation des articles 10 et 11 de la Constitution , dans l’interprétation de l’article 53 alinéa 1er de la loi du 17 mai 2006 sur le statut externe selon laquelle cette disposition fait interdiction absolue au condamné de pouvoir être représenté par son conseil aux audiences du tribunal d’application des peines ; mais que cette disposition ne viole pas les susdits articles de la Constitution dans l’interprétation selon laquelle le condamné ne peut pas se faire représenter par son conseil à une audience où le tribunal de l’application des peines examine l’octroi d’une modalité d’exécution de la peine, voyez C. const., 4 mars 2009, Rev. dr.pén. crim., 2009, p. 847, et H.D. Bosly et alii, op. cit., p. 1383.
34. Article 53 de la loi sur le statut externe.
35. Voyez H.D. Bosly et alii, op. cit., p. 1385 et références mentionnées.
36. Article 96 de la loi sur le statut externe. Le pourvoi en cassation n’est ouvert qu’au ministère public et au condamné. La victime ne peut pas former un tel pourvoi.
37. Article 97 alinéa 1 de la loi sur le statut externe.
38. Une règle de portée générale, voyez commentaires à ce propos dans l’ouvrage de H.D. Bosly et alii, op. cit.