Les actions en exclusion et en retrait d'associés
Le jugement d'exclusion ou de retrait et son exécution (4/5)
Les actions en exclusion et en retrait doivent être introduites devant le président du tribunal de commerce de l’arrondissement judiciaire dans lequel la société a son siège, siégeant comme en référé 18. Cette procédure a donc les formes du référé mais l’urgence n’est pas requise pour saisir valablement le juge et la décision rendue par ce dernier n’est pas provisoire mais dotée de l’autorité de la chose jugée 19.
Avant même de prendre sa décision, le président du tribunal peut adopter des mesures conservatoires. Il peut suspendre les droits attachés aux titres concernés sauf le droit aux dividendes 20. L’objectif est notamment d’empêcher les défendeurs à une action en exclusion d’agir à l’encontre de l’intérêt social avant de devoir transférer leurs titres 21. Le juge est libre de décider les droits qui seront suspendus et la durée de cette suspension. Par ailleurs, les défendeurs à la cause ne peuvent, après que la citation leur ait été signifiée, aliéner leurs titres ou les grever de droits réels sauf avec l’accord du juge ou des parties à la cause 22. Cette interdiction ne vaut que pour les actions en exclusion car elle vise à éviter que les associés dont on poursuit l’exclusion ne cèdent leurs titres et fassent ainsi perdre l’objet aux actions intentées. Pareil interdiction n’a pas de sens lors d’une action en retrait puisque le demandeur agit pour qu’on lui rachète ses titres 23.
Même s’il n’y est pas contraint 24, le juge fait généralement appel à l’aide d’un ou de plusieurs experts pour la détermination du prix de transfert des titres. Cela s’explique par la difficulté de l’estimation basée sur un nombre de critères de plus en plus important. Par exemple, la détermination du prix peut s’opérer sur base du capital de la société ou sur le chiffre d’affaires réalisé. Une prime de majorité peut entrer en ligne de compte si les titres transférés permettent à l’acquéreur d’obtenir le contrôle de la société 25. Enfin, la détermination du prix doit intervenir au moment le plus proche du jugement qui ordonne le transfert des titres 26.
Comme le prévoit expressément le Code, le juge prononce une double condamnation. Par son jugement, il ordonne à certains de vendre leurs titres et aux autres de payer le prix fixé par lui. En règle, le juge doit respecter les différentes clauses qui modalisent la cessibilité des titres transférés 27.
Le jugement rendu tient lieu de titre pour le transfert des actions et parts. Il permet ainsi à l’acquéreur d’obtenir l’inscription du transfert dans le registre des titres ou la cession des titres dématérialisés 28.
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18. Articles 335, 340, 637 et 642 du Code des sociétés.
19. O. Caprasse et R. Aydogdu, Les conflits entre actionnaires : prévention et résolution, Bruxelles, Larcier, 2010, p. 311.
20. Articles 336, alinéa 2 et 638, alinéa 2 du Code des sociétés.
21. O. Caprasse et R. Aydogdu, op. cit., p. 313.
22. Articles 336, alinéa 1er et 638, alinéa 1er du Code des sociétés.
23. O. Caprasse et R. Aydogdu, op. cit., p. 312.
24. Président du Tribunal de commerce de Hasselt, 2 février 2001, J.D.S.C., 2004, pp. 389-396.
25. Ibidem.
26. Appel Liège, 12 septembre 2005, J.L.M.B., 2007, p. 986.
27. Articles 337 et 639 du Code des sociétés.
28. O. Caprasse et R. Aydogdu, op. cit., p. 330.