La transmission de l'immeuble dans le cadre du bail commercial
Le bail commercial à une date certaine antérieure à la transmission (4/6)
Lorsque le contrat de bail acquiert une date certaine avant la transmission, deux hypothèses doivent être distinguées.
1) Absence de clause d’expulsion
Si le bail ne contient pas de clause d’expulsion au profit de l’acquéreur, le locataire jouit d’une protection parfaite 6. Conformément au droit commun du bail, l’acquéreur est tenu de respecter les termes du contrat.
2) Présence d’une clause d’expulsion
Par contre, lorsqu’une clause d’expulsion a été insérée dans le bail, la loi fait intervenir le régime particulier de protection. Normalement, le droit commun du bail permet à l’acquéreur d’expulser le preneur sans motif et moyennant un congé dont la durée dépend de l’usage des lieux et des dommages et intérêts payés au locataire expulsé 7. Dans le cadre d’un bail commercial, la situation est différente. L’acquéreur ne peut expulser le preneur que pour certaines raisons et « moyennant un préavis d’un an donné dans les trois mois de l’acquisition et énonçant clairement le motif justifiant le congé » 8.
Quant aux motifs que l’acquéreur peut invoquer, l’article 12 renvoie à une autre disposition de la loi consacrée aux raisons qui permettent au bailleur de refuser le renouvellement du bail. En conséquence, l’acquéreur ne peut expulser le locataire que pour occupation personnelle du bien, pour désaffecter l’immeuble de sa destination commerciale, pour reconstruire le bâtiment ou la partie du bâtiment dans laquelle le preneur exerce son activité ou pour manquements graves du preneur aux obligations qui découlent du bail 9.
Le congé doit être donné par l’acquéreur dans les trois mois qui suivent l’acquisition du bien loué. Comme nous l’avons précisé, l’acquisition se produit à la date à laquelle l’acte de transmission acquiert date certaine par enregistrement ou acte authentique. Ce n’est qu’à partir de cette date que le délai de trois mois commence à courir 10. Dans le cadre de l’aliénation la plus courante, la vente, l’acheteur a donc intérêt à enregistrer le compromis de vente afin de faire débuter le délai le plus tôt possible 11.
D’un point de vue probatoire, il est conseillé que le congé soit notifié par lettre recommandée ou par exploit d’huissier mais la loi ne l’impose pas 12. Quoi qu’il en soit, le congé doit mentionner clairement le motif pour lequel l’acquéreur expulse le preneur. Ce dernier pourra ainsi vérifier la légalité du congé.
Le préavis notifié au preneur doit être d’un an. Cependant, cette durée est un minimum et rien n’empêche l’acquéreur d’allonger le délai. Si la durée du préavis est inférieure au minimum légal, celui-ci n’est pas nul mais ne sortira ses effets qu’après un délai d’un an 13.
Enfin, la loi prévoit expressément que l’acquéreur qui souhaite expulser le locataire doit respecter les conditions imposées par la loi sous peine de déchéance. Cela signifie que l’acquéreur perd son droit d’expulser le preneur et doit respecter les termes du contrat en cours.
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6. Rép. not., « Le bail en général » (Y. Merchiers), t. VIII, l. I, éd. 1997, n° 497.
7. M. Godhaird, Le bail commercial, Bruxelles, Larcier, 2012, p. 250.
8. Article 12, alinéa 1er de la loi sur les baux commerciaux.
9. Article 16, I, 1° à 4° de la loi sur les baux commerciaux.
10. Tribunal civil de Gand, 20 février 1995, J.L.M.B.i., 1997/03, p. 116.
11. M. Godhaird, op. cit., p. 254.
12. M. Godhaird, op. cit., p. 256.
13. Justice de paix de Marchienne-au-Pont, 8 mai 1998, J.L.M.B., 1999, p. 658.