La sous-traitance dans le domaine de la construction
Le contrat de sous traitance dans le domaine de la construction (3/4)
Juridiquement, le contrat de sous-traitance est indépendant du contrat d'entreprise principal. Ainsi, le cahier des charges de l'entrepreneur et les pénalités de retard prévues dans le contrat d'entreprise ne sont pas opposables aux sous-traitants 5. Dans le même ordre d'idées et à défaut d'en convenir autrement, la réception des travaux sous-traités s'opère indépendamment de la réception des travaux réalisés par l'entrepreneur principal 6.
En ce qui concerne le contrat de sous-traitance, il s'agit en réalité d'un contrat d'entreprise conclu entre un maître de l'ouvrage (l'entrepreneur principal) et un entrepreneur (le sous-traitant). Les règles en matière de contrat d'entreprise trouvent donc à s'appliquer avec quelques nuances dues à la personnalité des parties. Ainsi le sous-traitant, ayant un domaine d'expertise dépassant celui de l'entrepreneur, doit nécessairement exprimer les réserves sur les indications erronées fournies par l'entrepreneur 7.
Comme la faculté existe en faveur du maître de l'ouvrage, l'entrepreneur peut procéder au remplacement du sous-traitant défaillant 8. Généralement, l'entrepreneur fait intervenir un autre sous-traitant sans demander au préalable l'autorisation en justice. Cette possibilité est autorisée mais le juge appréciera a posteriori si les conditions d'application ont été respectées 9. Ainsi, le juge doit notamment vérifier que le sous-traitant a commis un grave manquement, que l'urgence nécessitait une solution rapide, que l'entrepreneur a mis en demeure le sous-traitant d'exécuter correctement ses obligations et qu'il a établi un constat contradictoire de la situation du chantier 10.
Étant donné que le contrat de sous-traitance est un contrat d'entreprise, l'entrepreneur bénéficie de la faculté de résiliation unilatérale prévue par la loi. Le législateur accorde au maître de l'ouvrage une faculté de résiliation unilatérale à charge pour lui de dédommager l'entrepreneur de toutes ses pertes et de son manque à gagner 11. La disposition prévoyant cette faculté n'étant pas d'ordre public, les parties peuvent y déroger en limitant ou en supprimant ce droit du maître de l'ouvrage ou encore en attribuant également ce droit à l'entrepreneur 12.
Enfin, et indépendamment 13 de l'action directe qui lui est reconnue à l'égard du maître de l'ouvrage, le sous-traitant bénéficie d'un privilège. Pendant cinq ans à dater de sa facture, le sous-traitant doit être payé par préférence aux autres créanciers de l'entrepreneur 14.
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5. Appel Liège, 25 octobre 2002, J.L.M.B., 2002, p. 1076.
6. Appel Anvers, 12 juin 2001, R.W., 2003-2004, p. 187.
7. Tribunal civil de Charleroi, 5 février 2003, J.L.M.B., 2004, p. 968.
8. Article 1144 du Code civil.
9. Tribunal de commerce de Mons, 30 mars 2010, R.G.D.C., 2011, p. 91.
10. A. Delvaux, B. de Cocqueau, R. Simar, B. Devos et J. Bockourt, Le contrat d'entreprise : Chronique de jurisprudence 2001-2011, Bruxelles, Larcier, 2012, pp. 457-458.
11. Article 1794 du Code civil.
12. Appel Liège, 23 mars 2009, J.T., 2009, p. 502.
13. Appel Liège, 28 mars 2000, R.R.D., 2000, p. 236.
14. Article 20, 12° de la loi hypothécaire du 16 décembre 1851.