Le testament
La révocation et la caducité des testaments (6/7)
Le législateur, la doctrine et la jurisprudence ont déterminé plusieurs causes pouvant mener à la révocation ou à la caducité du testament ou d'un legs.
L'effet de cette révocation ou caducité est que le testament ou le legs en question, ne peut ni sortir ses effets, ni être exécuté. 52
La révocation
La révocation consiste à l'anéantissement d'un legs ou du testament. Cette révocation se fait par la volonté du testateur.
Le principe général est que les testaments et les legs peuvent être révoqués. Cela étant, pour un souci de sécurité, le législateur a mis en place des réglementations encadrant cette révocation.
Ainsi, les testaments peuvent être révoqués, en tout ou en partie, que par un testament postérieur, ou par un acte devant notaires, portant déclaration du changement de volonté. 53
Cela étant, il est également possible que le testament soit révoqué de manière tacite. 54 Le Code civil a prévu deux possibilités de révocation tacite et la pratique en a prévu une troisième. 55
Premièrement, les testaments postérieurs qui ne révoqueront pas d'une manière expresse les précédents testaments, annuleront, dans ceux-ci, de manière tacite les dispositions contenues qui se trouveront incompatibles avec les nouvelles, ou qui seront contraires. 56
En outre, la révocation tacite faite dans un testament postérieur aura tout son effet, quoique ce nouvel acte reste sans exécution par l'incapacité de l'héritier institué ou du légataire, ou par leur refus de recueillir. 57
La seconde manière de révoquer tacitement le testament est le fait que le testateur aliène la chose léguée. En effet, toute aliénation, celle même par vente avec faculté de rachat ou par échange, que fera le testateur de tout ou de partie de la chose léguée, emportera la révocation du legs pour tout ce qui a été aliéné, encore que l'aliénation postérieure soit nulle, et que l'objet soit rentré dans la main du testateur. 58
La pratique a également ajouté un type de révocation tacite du testament, il s'agit de la destruction de celui-ci. 59 La doctrine et la jurisprudence admettent que le fait pour le testateur de détruire son testament équivaut à une révocation de ce dernier. 60
Par ailleurs, il est utile de préciser qu'au décès du testateur, certaines personnes peuvent demander la révocation en justice du testament ou de certaines clauses reprises dans celui-ci. Les causes permettant la révocation judiciaire d'un legs sont, notamment, l'inexécution des charges imposées par le testateur et l'ingratitude du légataire.
A cet égard, les héritiers ne peuvent demander la révocation pour cause d'ingratitude que si :
- Le testateur est décédé dans l'année à compter soit du jour du délit, soit du jour où il a pu connaître le délit ; les héritiers doivent alors intenter l'action dans l'année à compter soit du jour du délit, soit du jour où le testateur a pu connaître le délit ;
- Le testateur est décédé sans qu'il ait pu connaître le délit ; les héritiers doivent alors intenter l'action dans l'année à compter soit du jour du décès, soit du jour où ils ont pu connaître le délit, soit du jour où ils ont pu connaître le legs.
En outre, si cette demande est fondée sur une injure grave faite à la mémoire du testateur, elle doit être intentée dans l'année, à compter du jour du délit ou du jour où les héritiers ont pu connaître le délit. 61
La caducité
La caducité des testaments est prévue légalement par les articles 1039 à 1043 du Code civil. 62
Le principe de la caducité est qu'un legs est caduc lorsqu'un acte ou un fait postérieur au testament et indépendant de la volonté du testateur rend le legs inefficace. 63
La première cause de caducité est le prédécès du légataire. En effet, toute disposition testamentaire sera caduque, si celui en faveur de qui elle est faite n'a pas survécu au testateur. 64
La deuxième cause de caducité est l'incapacité du légataire. Il faut préciser que si l'incapacité du légataire existe au moment de la rédaction du testament, le legs est nul. A contrario, si l'incapacité du légataire survient après l'ouverture de la succession, le legs sera caduc.
La troisième cause de caducité est que le legs sera caduc, si la chose léguée a totalement péri pendant la vie du testateur. 65
Enfin, le legs sera caduc, lorsque le légataire la répudiera ou se trouvera incapable de la recueillir. 66
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52. A.-Ch. Van Gysel, « Précis du droit des successions et des libéralités », Faculté de droit de l'Université libre de Bruxelles, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 221.
53. Article 1035 du Code civil.
54. P. Moreau, « Les modes de révocation tacite du testament », J.L.M.B., 2010/35, pp. 1666-1667.
55. A.-Ch. Van Gysel, « Précis du droit des successions et des libéralités », Faculté de droit de l'Université libre de Bruxelles, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 215.
56. Article 1036 du Code civil.
57. Article 1037 du Code civil.
58. Article 1038 du Code civil.
59. H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, tome 8/2, Les testaments, 2e édition, Bruxelles, Bruylant, 1336, n° 1185 C.
60. Voyez : Anvers, 24 septembre 1953, R.C.B.J.., 1954, p. 2671 et note Piret.
61. Article 1047 du Code civil ; Cass., 12 décembre 1889, Pas., 1890, I, p. 33.
62. Voyez : Cass. (1ère ch., F.), 21/01/2000, C.1998.0335.F., Lar. Cass., 2000/2, p. 55.
63. A.-Ch. Van Gysel, « Précis du droit des successions et des libéralités », Faculté de droit de l'Université libre de Bruxelles, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 220.
64. Article 1039 du Code civil.
65. Article 1042 du Code civil.
66. Article 1043 du Code civil.