Le régime primaire
La protection du logement familial (2/9)
Parmi les règlementations du régime primaire, l'article 215 du Code civil organise la protection du logement principal de la famille dont est propriétaire ou locataire l'un des époux, ou les deux d'entre eux. 8
Cette protection porte sur le bien immeuble 9, ainsi que ses annexes 10, à l'exclusion des habitations qualifiées de meubles (roulotte, caravane, péniche d'habitation, mobile home, voitures de la famille). 11
Le logement familial peut être défini comme étant le lieu privilégié et principal où la famille est logée, vit, se retrouve et partage des activités de manière réelle et effective. 12
L'article 215 du Code civil a pour but de protéger ce logement familial en empêchant l'un des deux époux de pouvoir accomplir seul certains actes (vendre, louer, hypothéquer,…) qui auraient pour conséquence de priver l'autre conjoint et, le cas échéant, les enfants de la possibilité de continuer de résider dans ce logement. 13
Partant, le législateur a imposé qu'un conjoint, ne peut, sans l'accord de l'autre, disposer entre vifs à titre onéreux ou gratuit des droits qu'il possède sur l'immeuble qui sert au logement principal de la famille.
En outre, un époux ne peut, sans le même accord, ni disposer entre vifs à titre onéreux ou gratuit, des meubles meublants qui garnissent l'immeuble servant au logement principal de la famille, ni les donner en gage.
Cela étant, si l'époux dont le consentement est requis refuse de donner son accord sur un acte d'aliénation, le conjoint peut se faire autoriser par le tribunal de première instance et, en cas d'urgence, par le président de ce tribunal, à passer l'acte seul. 14
En effet, le juge peut autoriser un conjoint à poser un acte sur le logement familial, et ce, malgré qu'il n'ait pas obtenu le consentement de son époux. Pour autoriser l'époux demandeur, le juge prend en compte les intérêts économiques et moraux de la famille.
Lorsque les époux sont locataires d'un bien immobilier ayant été affecté au logement principal de la famille, le législateur a également mis en place des protections. 15
Le droit au bail du bien immobilier, loué par un époux avant le mariage et qui est affecté au logement principal de la famille, appartient conjointement aux époux. 16 Cela étant, cette protection n'a pas pour objet que l'époux non signataire du bail devienne co-bailleur ou co-locataire. En effet, la protection vise uniquement son droit de ne pas être privé du logement familial. 17
En ce qui concerne les congés, notifications et exploits relatifs au bail, ceux-ci doivent être adressés à chacun des époux, et ce, à peine de nullité. 18 En outre, il en va de même pour les époux, ceux-ci doivent donner congé conjointement.
Cela étant, il est important de souligner que les époux ne peuvent se prévaloir d'une nullité du congé que si le bailleur a ou devait avoir connaissance du mariage entre les époux. 19
_______________
8. Article 215 du Code civil.
9. Article 517 du Code civil.
10. M. Verwilghen, « La protection du logement familial », Rép. not., t. V, n° 73.
11. Civ. Liège , réf., 31 août 1990, Rev. trim. dr. fam., 1991, p 81.
12. B. Hubeau, « La loi du 20 février 1991 sur le logement familial. Elément de pacification ou calme avant la tempête? », Journ. procès, 1994, n° 256, p. 20 .
13. Bruxelles, 27 avril 2006, R.T.D.F., 2007, p. 274.
14. Article 215, § 1er, alinéa 3 du Code civil.
15. P. De Page, Le régime matrimonial, 2e éd., Bruxelles, Bruylant, 2008, pp. 16 et suivantes.
16. Article 215, § 2 du Code civil.
17. Civ. Bruxelles 28 avril 1983, R.T.D.F., 1985, p. 296.
18. Cass., 6 octobre 1978, Pas., 1979, I, p. 170.
19. Article 215 du Code civil ; Cass., 7 avril 1994, Pas., 1994, I, p. 344.