L’enrichissement sans cause
Les effets de l'enrichissement sans cause (6/7)
Si toutes les conditions de l'enrichissement sans cause sont remplies, une obligation de restitution naît dans le chef de l'enrichi. Celui-ci doit restituer le montant de son enrichissement à l'appauvri, sans toutefois que ce montant ne puisse être supérieur au montant de l'appauvrissement51.
Cette restitution doit se faire en principe en nature52. Si la restitution en nature est impossible (ce qui est fréquemment le cas), elle se fait par équivalent sous la forme d'une indemnité. Toutefois, dans certains cas, le législateur prévoit expressément les modalités de l'obligation de restitution. C'est le cas notamment lorsqu'une disposition légale fait une application spécifique de l'enrichissement sans cause.
Lorsque la restitution se fait par équivalent, le juge doit calculer le montant de l'appauvrissement et celui de l'enrichissement, l'enrichi étant tenu de payer le montant le moins élevé des deux sommes calculées53. En pratique, il est rare que le magistrat puisse chiffrer avec exactitude ou avec l'aide de données concrètes et objectives le montant des restitutions. Il statue donc le plus souvent en équité54.
L'appauvrissement est évalué à l'époque de sa réalisation tandis que l'appauvrissement est évalué au jour de l'introduction de l'action de in rem verso, voire au moment où le juge statue. Cette solution permet de tenir compte de l'évolution de la situation de l'enrichi et d'éviter qu'il ne soit tenu d'indemniser l'appauvri au-delà du profit dont il a effectivement bénéficié55.
Ainsi, si l'objet de l'enrichissement ne se trouve plus dans le patrimoine du défendeur au jour de l'intentement de l'action, celle-ci ne peut être accueillie56.
En effet, la théorie de l'enrichissement sans cause trouve sa raison d'être dans la volonté de maintenir intact le patrimoine de chacun, il serait donc illogique de condamner une partie à la restitution d'un enrichissement qui n'existe plus dans son patrimoine, sous peine de la mettre en difficulté et de déséquilibrer à nouveau les patrimoines57.
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51. P. Van Ommeslaghe, Droit des obligations, Bruylant, Bruxelles, 2010, p. 1127.
52. H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge. Les obligations, t. III, 3e éd., Bruxelles, Bruylant, 1967, p.60, n°46.
53. P. Van Ommeslaghe, Droit des obligations, Bruylant, Bruxelles, 2010, p. 1128.
54. C. Marr, «L'enrichissement sans cause : un fondement d'équité sous une apparente rigueur » in Les sources d'obligations extracontractuelles, Bruges-Bruxelles, la Charte, p.249.
55. A. Deleur, E. Montero et A. Putz,. « Les quasi-contrats », Obligations - Traité théorique et pratique, Suppl. 15, Bruxelles, Kluwer, 2009, p.II.4.3-16.
56. Gand, 11 jullet 1955, Pas., 1956, II, p. 64.
57. A. Deleur, E. Montero et A. Putz,. « Les quasi-contrats », Obligations - Traité théorique et pratique, Suppl. 15, Bruxelles, Kluwer, 2009, p.II.4.3-17.