La nullité d'une clause pénale spéculant sur l'inexécution du contrat de courtage
Présentation des faits 1
Un couple décide de confier à un agent immobilier un mandat exclusif de vente qui concerne leur immeuble commun. Le contrat de mandat contenait une clause selon laquelle la mission confiée à l'agent durait six mois et qu'elle serait renouvelée par tacite reconduction pour une ou des périodes de même durée sauf s'il y a renonciation par lettre recommandée au moins trente jours avant l'expiration de la période en cours.
L'un des époux a notifié renon par lettre recommandée à l'agent immobilier. Ce dernier a prétendu avoir droit à une indemnité du fait de la rupture du mandat par les mandants. Il a fondé sa demande sur une clause du contrat de courtage qui prévoit que la rémunération du contrat de mandat, exécuté par le mandataire, s'élève à une somme égale à quatre pour cent du prix de vente obtenu, au jour de la passation de l'acte et qu'une rupture du présent mandat par les mandants rapporte au mandataire une indemnité égale à cinq pour cent du prix de vente convenu dans l'acte de mandat.
Cette réclamation fut portée devant le tribunal de première instance. Le premier juge a annulé cette clause pénale car il la considérait comme abusive du fait que par cette clause, l'agent spéculait plus sur l'inexécution du contrat que sur sa bonne exécution. Un appel fut interjeté.
Décision de la Cour d'appel de Liège
La Cour d'appel relève que la comparaison de la rémunération de quatre pour cent d'une activité complète et réussie du mandataire et de l'indemnité supérieure de cinq pour cent qui lui est due en cas de rupture par les mandants, quelles que soient sa carence et ses inexécutions, donne au mandataire un intérêt objectif supérieur à l'inexécution de la convention qu'à son exécution normale.
De plus, cet intérêt de l'agent est renforcé par le fait que le contrat ne prévoit pas d'indemnités en cas de rupture ou de faute incombant au mandataire. La Cour constate que tous les éléments de la cause et les usages des contrats d'agents immobiliers prouvent à suffisance que la clause litigieuse est une clause pénale abusive spéculant plus sur l'inexécution du contrat que sur son exécution. En conséquence, la Cour confirme le jugement attaqué en ce qu'il annule cette clause du contrat.
Bon à savoir
Les clauses pénales sont des clauses qui indemnisent de manière forfaitaire le dommage résultant de l'inexécution de la convention 2. Si l'indemnité prévue par cette clause pénale n'est pas exagérée, cette clause est valable et doit être appliquée 3. Néanmoins, une clause pénale par laquelle une partie à un contrat spécule sur l'inexécution du contrat est une clause nulle. Il en est ainsi lorsque cette clause procure à celui en faveur de qui elle est stipulée un avantage bien plus important que celui qu'elle pouvait escompter d'une exécution normale du contrat 4.
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1. Appel Liège, 20 février 2007, J.L.M.B., 2007/32, p. 1349.
2. Appel Bruxelles, 1er juin 2004, J.L.M.B., 2005/34, p. 1491.
3. Appel Gand, 8 janvier 1997, A.J.T., 1997-1998, p. 5.
4. T. Sarosselets et J. Périlleux, « Un lapsus révélateur : la complexité de la réglementation de la clause pénale en droit belge », J.T., 2003, p. 762.