Le droit à la commission en cas de vente postérieure à l'expiration du contrat de courtage
Présentation des faits 1
Les propriétaires d'un immeuble décident de le mettre en vente. Ils chargent une agence immobilière de rechercher des acquéreurs. Devant l'échec de l'agence, les propriétaires envoient un courrier de résiliation du contrat.
Quelques mois plus tard, les propriétaires concluent une vente avec un candidat acquéreur. Suite à cela, l'agence immobilière réclame aux vendeurs le paiement de la commission qui était prévue dans le contrat au motif que l'acheteur aurait été en contact avec cette société en qualité d'acheteur potentiel.
L'agence introduit une action en justice afin d'obtenir le paiement de cette commission d'un montant légèrement inférieur à 10.000 euros.
Décision du Tribunal civil de Tournai
Le tribunal constate que le contrat conclu entre les propriétaires de l'immeuble et l'agence immobilière contenait une clause qui concerne ce cas de figure. Cette clause stipule que : « dans le cas où le bien est vendu dans un délai de six mois après l'expiration de la convention à un des candidats acheteurs avec qui l'agence aura traité ou à qui elle aura procuré des informations précises et individuelles sur le bien immobilier, le propriétaire vendeur sera tenu de lui verser la commission intégrale ».
Ensuite, le tribunal rappelle que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver 2 et que chacune des parties à un litige a la charge de prouver les faits qu'elle allègue 3. Malgré la présence du nom de l'acquéreur sur une liste communiquée par l'agence immobilière, le tribunal considère que l'agence ne parvient pas à démontrer que le tiers acquéreur avait traité avec elle ou qu'elle lui avait fourni des informations sur l'immeuble mis en vente. En conséquence, l'agence n'a pas droit à la commission qu'elle réclame.
Bon à savoir
Lorsque les propriétaires d'un bien immobilier font appel à un agent immobilier pour rechercher des acquéreurs potentiels, un contrat de courtage est conclu. Il n'est pas rare que ce contrat contienne une clause selon laquelle l'agent peut prétendre à percevoir une commission si le bien est vendu dans un certain délai après l'expiration du contrat de courtage mais grâce aux prestations fournies par lui. Cette clause permet d'éviter que les vendeurs ne profitent du travail effectué par un agent immobilier sans devoir en payer le prix.
Même si l'agent immobilier peut valablement se prévaloir d'une telle clause, il faut encore qu'il démontre que ses conditions d'application sont réunies. Il lui appartient de prouver qu'il a effectivement traité avec l'acquéreur ou qu'il lui a « procuré des informations précises et individuelles » sur le bien mis en vente.
Si la communication d'une liste des amateurs permet généralement d'éviter toute contestation quant à l'intervention de l'agent dans le recrutement de l'acquéreur 4, il en est parfois autrement. En effet, la communication d'une longue liste de noms (environ six cents dans le cas d'espèce), éventuellement accompagnés d'un numéro de téléphone mais sans autre commentaire, ne suffit pas à établir que les conditions de la clause précitée se soient réalisées. Pareil nombre de noms, qui apparaît hautement inhabituel pour un bien ordinaire, plaide plutôt en sens contraire. Ce genre de document laisse à penser qu'il s'agit plus d'une base de données que d'une liste de personnes avec lesquelles l'agent est véritablement entré en contact et a réalisé des prestations à leur égard. Il en va autrement si l'agent peut se prévaloir d'un échange de courriers ou d'emails entre lui-même et l'acquéreur du bien 5.
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1. Tribunal civil de Tournai, 7 février 2013, J.T., 2013/21, p. 404.
2. Article 1315 du Code civil.
3. Article 870 du Code judiciaire.
4. Appel Liège, 26 avril 1988, J.L.M.B., 1998, p. 1381.
5. Appel Mons, 2 décembre 2008, J.L.M.B., 2009/24, p. 1124.