La déductibilité des frais professionnels – causes illicites
Présentation des faits 1
Monsieur A., contribuable, est marchand de glaces. Durant les vacances scolaires, il s’est fait aider par ses deux enfants mineurs.
Monsieur A. a octroyé un 'salaire' à ses enfants. Il a ensuite déduit les salaires comme étant des charges professionnelles.
Le service de taxation a rejeté ces frais dès lors que ces prestations de travail constituaient une infraction à la loi du 5 août 1992 concernant le travail des enfants.
Un arrêt de la Cour d’appel de Gand a été rendu 30 octobre 2012 en défaveur de Monsieur A. En effet, les juges d’appel ont rejeté la déduction des rémunérations à titre de frais professionnels dès lors qu’elles ont été payées en violation de l’interdiction de faire travailler les enfants, qui est d’ordre public, et que ces frais ont donc une cause illicite.
Ce dernier s’est donc pourvu en Cassation.
Décision de la Cour de cassation
La Cour de cassation se réfère à l’article 49 du Code des impôts sur les revenus 1992 qui dispose que sont déductibles, à titre de frais professionnels, les frais que le contribuable a faits ou supportés pendant la période imposable en vue d'acquérir ou de conserver les revenus imposables et dont il justifie la réalité et le montant au moyen de documents probants ou, quand cela n'est pas possible, par tous autres moyens de preuve admis par le droit commun, sauf le serment.
A cet égard, la Cour de cassation considère que la qualification de frais comme frais professionnels déductibles est subordonnée à la condition que ces frais aient été faits ou supportés en vue d’acquérir ou de conserver des revenus imposables et non à la condition qu’aucun comportement illicite ne soit à la base des frais.
Dès lors, la Cour de cassation constate que les juges d’appel ont subordonné la déduction des rémunérations à titre de frais professionnels à la condition qu’ils n’aient pas une cause illicite et ont, dès lors, violé l’article 49 du Code des impôts sur les revenus 1992.
La Cour casse l’arrêt attaqué.
Bon à savoir
Comme le prévoit l’article 49 du Code des impôts sur les revenus de 1992 2, la qualification d'une dépense comme charge professionnelle déductible est subordonnée à la condition que cette dépense ait été faite ou supportée en vue d'acquérir ou de conserver des revenus imposables. 3
La Cour de cassation a rappelé que l’article 49 ne prévoit pas une condition selon laquelle les frais doivent trouver leurs fondements dans un comportement licite.
Il n’y a donc pas lieu de subordonner la déduction des salaires au titre de charge professionnelle à la condition que ceux-ci "ne peuvent pas avoir une origine illicite". 4
Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.
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1. Cass. (1re ch.) RG F.13.0082.N, 31 octobre 2014 (M.V.,C.A. / Belgische Staat), http://www.cass.be (23 novembre 2014), concl. THIJS, D.
2. L. DEKLERCK., « 3.2 - Les conditions de déduction des frais professionnels » in Manuel pratique d'impôt des sociétés, Bruxelles, Éditions Larcier, 2013, p. 194-204.
3. T. AFSCHRIFT., M. DAUBE., « Sous-section 2 - Les conditions de déduction des frais professionnels » in Impôt des personnes physiques, Bruxelles, Éditions Larcier, 2009, p. 644-676.
4. Voyez : M. DE WOLF, J. MALHERBE, J. THILMANY,., « Section XII - Les frais professionnels » in Impôt des personnes physiques, Bruxelles, Éditions Larcier, 2013, p. 212-268.