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Bon a savoir

12 Février 2015

La taxation d'office des époux faisant l'objet d'une imposition commune

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Présentation des faits 1

Un couple marié conteste les cotisations relatives à l'impôt des personnes physiques pour les années 2005, 2006 et 2007, au motif qu'ils se sont séparés en 2000 et que depuis lors, Monsieur est parti s'installer en France et n'est plus résident belge.

Monsieur continue cependant à travailler en Belgique. Il revendique dès lors le statut de travailleur frontalier, taxable en France, en vertu de la Convention préventive de la double imposition conclue entre la France et la Belgique le 10 mars 1964.

En 2007, l'administration belge des contributions directes envoie une notification d'imposition d'office à chacun des époux respectivement à leur domicile en France et en Belgique, motivé par la circonstance que Monsieur n'a pas souscrit de déclaration à l'impôt des personnes physiques. L'administration estime que les revenus des époux doivent être compris dans la même formule de déclaration car la domiciliation de Monsieur en France serait fictive. Elle annonce également l'application d'un accroissement de 50 %.

Décision de la Cour d'appel de Mons

La Cour dispose qu'il découle de l'article 351 du Code d'impôt sur les revenus 1992 (C.I.R.) que lorsque des époux font l'objet d'une imposition collective, une notification d'imposition d'office doit être communiquée à chacun d'eux. Cette règle vaut tant pour les conjoints séparés de fait que pour les conjoints qui cohabitent sous le même toit et ce, quand bien même, seuls les revenus d'un des deux époux sont visés par la procédure d'imposition d'office.

Par ailleurs, lorsque le contribuable soutient n'être soumis à aucun impôt sur les revenus, il ne peut être taxé d'office que si l'administration fiscale établit qu'il en est autrement. En l'espèce, il n'est pas démontré que Monsieur disposait d'un foyer permanent d'habitation en France au sens de la Convention préventive de la double imposition entre la Belgique et la France, c'est-à-dire d'un endroit où il pouvait habiter normalement avec les commodités nécessaires en vue d'une occupation permanente dans des conditions de confort appropriées.

En effet, Monsieur ne produit aucun document de nature à établir sa présence effective en France tel que des factures de téléphones portable ou fixe, des preuves de paiement de carburant ou de denrées alimentaires en France et donc son intention d'y établir son domicile. Par ailleurs, Monsieur continue à travailler en Belgique et sa rémunération est versée sur un compte bancaire belge. De plus, le bien loué en France fait uniquement 15 m² et ne comprend ni salle de bain ni cuisine.

Par conséquent, la Cour estime que Monsieur n'a pas eu l'intention de transférer son domicile ou le siège de sa fortune en France et qu'il a conservé en Belgique le centre de ses intérêts, de son foyer familial, et sa résidence fiscale. C'est donc à bon droit que la procédure d'imposition d'office de ses revenus a été mise en œuvre par l'administration fiscale belge.

Par ailleurs, la Cour considère que la domiciliation fictive de Monsieur en France a été réalisée dans une intention frauduleuse d'éluder l'impôt des personnes physiques dû en Belgique, avec pour conséquence qu'il convient de maintenir les accroissements d'impôts infligés à concurrence de 50 %.

Bon à savoir

Les conjoints ou cohabitant légaux font en principe l'objet d'une imposition commune qui est établie au nom des deux membres du couple 2. Il en découle que les époux ou cohabitants doivent remplir une seule déclaration fiscale et reçoivent un seul avertissement extrait de rôle 3.

L'article 126, § 2, 2° du C.I.R. 1992 prévoit cependant que les personnes mariées ne font plus l'objet d'une imposition commune à partir de l'année qui suit celle au cours de laquelle une séparation de fait est intervenue, pour autant que cette séparation soit effective durant toute la période imposable 4. A cet égard, l'inscription dans le registre de la population ne constitue qu'un indice de l'existence d'une séparation de fait mais n'est pas déterminant. L'administration fiscale peut en effet utiliser tous les moyens de preuve légaux pour démontrer que l'inscription dans le registre de la population ne correspond pas à la réalité et que la séparation entre les époux est par conséquent fictive 5.

Par ailleurs, l'article 351 du C.I.R. 92 dispose que, lorsque le contribuable n'a pas fait de déclaration régulière, les imperfections de forme n'ont pas été réparées dans le délai accordé, qu'il n'a pas remis les pièces justificatives demandées, soit n'a pas produit à temps les renseignements demandés ou n'a pas répondu à temps à l'avis de rectification de la déclaration ; l'administration fiscale peut procéder à la taxation d'office 6.

Lorsque des époux font l'objet d'une imposition collective, la notification de l'imposition d'office doit être communiquée à chacun d'eux et ceci est valable tant pour les conjoints séparés de fait que pour les conjoints qui cohabitent sous le même toit 7. Il en est de même lorsque seuls les revenus d'un des deux époux sont visés par la procédure d'imposition d'office.

L'exercice du droit de taxer d'office est cependant subordonné à la preuve par l'administration fiscale de l'inexécution de ses obligations par le contribuable 8. L'administration doit donc motiver la notification de l'imposition d'office, ce qui implique qu'elle communique les motifs pour lesquels elle recourt à cette procédure, ainsi que le montant des revenus, les autres données sur lesquelles l'imposition est établie et la manière dont ces revenus ont été déterminés 9.

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

______________

1. Mons, 14 mars 2012, J.D.F., 2012/3-4, p. 114.

2. Article 126, § 1er du Code d'impôt sur les revenus (C.I.R.) 92/

3. M. Bourgeois et A. Romer, « Conception et traitement de la famille en matière d'impôt sur les revenus », in Familles : Union et désunion – Commentaires pratiques, Bruxelles, Kluwer, 2009, p. 5.

4. Article 126, § 2 du Code d'impôt sur les revenus (C.I.R.) 92.

5. F. Fogli, Comment optimaliser fiscalement et socialement son divorce ?, Liège, Edipro, 2006, p. 18.

6. Article 351 du Code d'impôt sur les revenus (C.I.R.) 92.

7. J. Bublot et C. Lenoir, Les procédures de rectification et d'imposition d'office, Bruxelles, Larcier, 2006, p. 141.

8. D. Nore, F. Smets, B. De Cock, I. Vandenbrouck, et L. Cassimon, « Procédure] Imposition - Recours administratif, dégrèvement d'office et actions en justice - Recouvrement – Sanctions », in Manuel de droit fiscal 2013-2014, Kluwer, Malines, 2014, p. 818.

9. Anvers, 2 janvier 1996, F.J.F., N° 96/7.