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COMPTABLE

Bon a savoir

4 Aout 2016

Les présomptions de l'homme en matière de marge bénéficiaire

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Présentation des faits 1

Un homme exerçait l'activité de technicien d'appareils de radio et de télévision en qualité d'indépendant. En 1981, il a déclaré à l'impôt des personnes physiques un revenu brut de 506.844 BEF dont il a déduit un total de charges de 255.410 BEF.

Le 7 décembre 1987, l'administration fiscale lui a notifié un avis de rectification pour majorer son revenu globalement imposable pour l'exercice d'imposition 1980.

Le 5 janvier 1988, le contribuable a fait part à l'administration fiscale de son désaccord, quant à sa décision de rectification.

Par la suite, le directeur régional des contributions directes a rejeté la réclamation introduite par le contribuable contre la cotisation à l'impôt des personnes physiques enrôlée pour un montant de 74.228 BEF sur une base imposable de 355.563 BEF. Le contribuable introduit un recours contre cette décision.

 

Décision de la Cour d'appel de Bruxelles

La Cour constate qu'en 1984, le contribuable a présenté à l'administration fiscale ses factures d'achats et de ventes avec les facturiers ainsi que ses déclarations et documents en matière de T.V.A. De même, en mai 1985, il lui a remis ses extraits d'un compte universel pour l'année 1979 et son livre de caisse de l'année 1979.

Or, c'est justement sur la marge bénéficiaire afférente à l'exercice d'imposition 1978, revenus de l'année 1977, que l'administration fiscale a entendu se référer pour justifier la majoration de la marge bénéficiaire pour l'exercice d'imposition en litige de 1980. De même, en ce qui concerne le nombre d'heures prestées pour la main d'œuvre, l'administration retient le même nombre d'heures que celui déterminé pour l'année 1977, soit 1.400 heures.

En effet, l'administration considère que l'accord donné à l'époque par le contribuable dans le cadre d'un contrôle T.V.A. sur ces deux éléments, l'engageait, en contributions directes, pour l'exercice d'imposition de 1980, sur la base de présomptions de l'homme.

Le contribuable se défend en indiquant que sa marge bénéficiaire sur les ventes a diminué entre 1977 et 1980 entre autres en raison de la concurrence grandissante de deux grandes surfaces commerciales. Par ailleurs, il apparaît qu'en 1977, le contribuable était marié. Or, en 1980, il était depuis lors divorcé, n'avait ni personnel, ni aucune aide et assumait seul le service au magasin, la gestion de son stock, la tenue de sa comptabilité, les déplacements pour l'achat de pièces, puis enfin l'exécution de ses dépannages en qualité de technicien.

Selon la Cour, il résulte de ce qui précède que le pourcentage de bénéfice et le tarif horaire de 1977 qui sont connus ne sont pas en liaison directe avec le pourcentage et le tarif de 1980.

La Cour observe d'ailleurs qu'il n'y a pas eu de rectification, en T.V.A., du chiffre d'affaires et de la marge bénéficiaire afférent à l'exercice d'imposition 1980 litigieux. Il en découle que l'administration n'établit pas, à suffisance de droit, le bien-fondé de la rectification litigieuse du chiffre d'affaires déclaré par le contribuable pour l'année 1980 sur la base d'une comptabilité régulièrement tenue.

Par conséquent, la Cour annule la cotisation supplémentaire enrôlée à l'impôt des personnes physiques au motif que l'administration fiscale ne peut majorer la marge bénéficiaire déclarée à l'impôt des personnes physiques par un contribuable en présumant qu'il a réalisé la même marge que celle à propos de laquelle il avait marqué un accord en T.V.A. pour un exercice antérieur.

 

Bon à savoir

Pour établir l'existence et le montant de la dette d'impôt, de même que pour établir une contravention aux dispositions du Code d'impôt sur les revenus (C.I.R.) 1992 ou des arrêtés pris pour son exécution, l'administration fiscale peut avoir recours à tous moyens de droit commun 2.

Dans la pratique, elle fait un grand usage du moyen de preuve que sont les présomptions de l'homme 3. Pour être admissibles, celles-ci doivent être graves, précises et concordantes 4. Il en découle que la notoriété publique ou la probabilité ne peuvent en principe pas être reconnues comme présomptions puisque ce ne sont pas des faits sûrs et certains 5.

Si l'administration retient des faits sûrs et certains comme base de l'application de la présomption, elle doit arriver à ses conclusions sur base d'un raisonnement logique et elle ne peut se baser sur de simples conjonctures 6.

Par ailleurs, par présomptions « précises », l'article 340 du C.I.R. entend que le fait inconnu soit en liaison directe avec les faits connus, dont le juge induit l'existence du fait inconnu 7. L'administration ne peut donc pas opérer une « superposition » de présomptions 8. Elle doit obligatoirement partir d'un élément certain, lui appliquer un raisonnement logique, et arriver de sorte à une conclusion.

Il en découle que l'application automatique à d'autres années de la marge bénéficiaire présumée et acceptée pour une année déterminée, est une superposition de présomptions et est, par conséquent, interdite 9.    

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

_______________________

1. Bruxelles, 13 février 2014, J.D.F., 2015/3-4, p. 102.

2. Article 340 du Code d'impôts sur les revenus 1992.

3. Voy. T. AFSCHRIFT « Propos sur quelques questions actuelles en matière de preuve », R.G.C.F., 2003/5, p. 38.

4. Article 1353 du Code civil.

5. Trib. Bruxelles, 28 février 2003, F.J.F., N° 2004/1 ; Mons, 13 novembre 2001, F.J.F., N° 2002/ 258.

6. D. NORE, F., SMET, B. DE COCK, I., VANDENBROUCK, L., CASSIMON, C., VERWEE et B. VAN VLIERDEN, B., [Impôt des personnes physiques. Procédure] Généralités - La déclaration - Le contrôle, in Manuel de droit fiscal 2014-2015, Malines, Kluwer2014, p. 771.

7. Cass., 10 avril 1973, Pas., 1973, I, p. 773.

8. Voy., E. Van BRUSTEM, « Présomption sur présomption vaut (parfois) », R.G.C.F., 2014/6, p. 415.

9. Liège, 13 mars 1985, Bull. Contr., 1986, n° 651;, Anvers, 11 juin 2013, F.J.F., N° 2014/18.