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NOTAIRE

Bon a savoir

4 Mars 2015

La clause de tontine dans l'acte authentique – Cessation de la relation

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le mois dernier.

Présentation des faits 1     

Les parties ont acquis un bien immeuble, le 18 avril 1991 devant notaire X. L'acte authentique contient une clause de tontine.

La clause de tontine insérée dans l'acte est la suivante :

« Il est convenu entre lesdits acheteurs que chacun d'eux obtient un droit de propriété conditionnel sur le bien. Le droit de chacun sera résolu par son prédécès. Il en résultera que le survivant obtiendra la pleine propriété du bien. Ce droit est acquis par chacun des acheteurs sous la condition suspensive du prédécès de l'autre. En raison de l'effet rétroactif de la réalisation de la condition suspensive, le survivant des acquéreurs sera considéré comme ayant totalement et directement acquis le bien du vendeur et non dans la succession du prédécédé. Le prédécédé sera, dès lors, considéré comme n'ayant jamais été propriétaire. Cette clause d'attribution est conçue par les acheteurs comme un contrat aléatoire à titre onéreux. Les parties considèrent que leurs chances d'acquérir finalement la propriété sont égales ».

Les parties se sont séparées en 2008. Monsieur A, a donc introduit une requête tendant à la liquidation et partage du bien immeuble.

Le pourvoi en cassation a été dirigé contre l'arrêt rendu le 11 mars 2013 par la cour d'appel d'Anvers.

La demanderesse considère que les dispositions légales suivantes ont été violées :

  • article 149 de la Constitution ;

  • Articles 815, 1102, 1104, 1106, 1108, 1131, 1134, 1186, 1175, 1181, 1183, 1234, 1382 1383 et 1964 du Code civil ;

  • Principe général du droit relatif à l'interdiction de l'abus de droit.

Le premier juge a considéré que, eu égard à la disparition de la raison d'être et de la cause de la convention de tontine, il y a lieu de la considérer comme caduque.

Conformément à l'article 815 du Code civil, la requête en liquidation et en partage du bien immobilier est fondée.

Décision de la Cour de Cassation

La Cour rappelle que la clause de tontine est, comme il ressort de sa formulation, un contrat aléatoire.

En ce qui concerne un tel contrat, la disparition de la cause, après la conclusion du contrat, n'entraîne pas l'extinction du contrat. 2

Effectivement, la convention de tontine constitue un contrat aléatoire, soit un contrat synallagmatique et un contrat à titre onéreux et, dans de tels contrats, la disparition de la cause, qui est une condition de validité du contrat, n'entraîne pas la caducité du contrat.

Cela étant, l'existence d'une cause 3 doit en principe être appréciée au moment de la naissance de l'acte juridique dont elle constitue une condition de validité.

La disparition ultérieure de cette cause est, en principe, sans incidence sur la validité de l'acte juridique.

Néanmoins, une convention de tontine qui se construit sur la base d'une relation de fait ou juridique existant entre les parties cesse toutefois d'exister lorsque ces rapports prennent fin, de sorte que l'exécution ultérieure de cette convention est privée de tout sens.

Par conséquent, le premier juge a, à bon droit et judicieusement, déclaré fondée la requête du défendeur tendant à la liquidation et au partage du bien immeuble acquis par les parties par l'acte notarié du 18 avril 1991 et ordonné la vente publique des biens qui ne sont pas commodément partageables.

Bon à savoir   

La cause de l'insertion de la clause de tontine dans l'acte d'achat consiste à la protection civile et fiscale de l'un des partenaires vis-à-vis de l'autre en cas de décès d'une des parties. 4

En effet, les caractéristiques propres à la clause de tontine sont les suivantes : il s'agit d'un contrat, par lequel deux ou plusieurs personnes acquièrent ensemble un ou plusieurs biens et par lequel le survivant devient propriétaire de la totalité du bien en ce sens que le survivant sera censé toujours avoir été le seul propriétaire. 5

Cela étant, lorsque, par la cessation de la relation affective, le contrat de tontine n'a plus de raison d'être et plus d'effet, naît entre les parties une indivision ordinaire dont le partage peut être demandé sur base de l'article 815 du Code civil. 6

En outre, la poursuite de l'exécution par le cocontractant d'un contrat synallagmatique qui, en raison de circonstances modifiées, a perdu sa raison d'être et, dès lors, sa cause, doit être considérée comme un abus de droit au sens de l'article 1134, dernier alinéa, du Code civil.

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

______________

1. Cour de cassation (1ère chambre), 6 mars 2014, J.L.M.B., 2014/26, pp. 1230-1234.

2.  Articles 1102, 1104, 1106, 1108, 1131, 1134, alinéa 2, 1234 du Code civil.

3. Articles 1108 et 1131 du Code civil.

4. Voy., notamment, V. Sagaert et S. Bouly, « Een restrictieve omschrijving voor het voorwerp van een opstalrecht ? », note sous Cass., 23 mai 2013 et 13 septembre 2013, R.W., 2014, p. 1460

5. D. Michiels., « Tontine et accroissement », in Les régimes matrimoniaux, 2008, Kluwer, T.X.0-1 - T.X.3-38 (79 p.).

6. Voy., notamment, Ch. Engels, « Vrijwillig aangegane onverdeeldeheid : pacta sunt servanda ? », sous Cass., 20 septembre 2013, et Cass., 6 mars 2014, T. Not., 2014, n° 4.