Les témoins dans le cadre d'un testament international
Présentation des faits 1
En juillet 2014, Madame A établit un testament devant le notaire X. Par ce testament, elle lègue hors part à une de ses filles, Madame B, deux terrains à bâtir.
Il y a lieu de préciser que le testament n'a pas été signé par la testatrice, en raison de sa faiblesse.
Madame C, second enfant de Madame A, a demandé l'annulation du testament, notamment pour le motif qu'un allié au troisième degré de la testatrice a comparu comme témoin.
En effet, le témoin est marié à Madame E qui est la fille de Madame G, sœur de la testatrice.
En première instance, le testament en question a été annulé. Le juge a estimé que le testament était nul en tant que testament fait par acte public, mais valable comme testament international étant donné que la loi du 2 février 1983 instituant un testament à forme internationale et modifiant diverses dispositions relatives au testament, ne contient pas de dispositions prohibant l'intervention de parents ou d'alliés en tant que témoins.
Madame C se pourvoit en cassation considérant qu'ont été violés :
- L'article V.1 de la Convention du 26 octobre 1973 portant loi uniforme sur la forme d'un testament international et son Annexe ont été violées ;
- Les articles 1.1., 4.1, 5.1. et 5.3. de la loi du 2 février 1983 instituant un testament à forme internationale et modifiant diverses dispositions relatives au testament ;
- Les articles 10, alinéas 2 et 4, combiné à l'article 8, alinéa 1er, et 114 de la loi du 25 ventôse de l'an XI (16 mars 1803) contenant organisation du notariat.
Décision de la Cour de cassation
La Cour rappelle qu'en vertu de l'article V.1. de la Convention du 26 octobre 1973, les conditions requises pour être témoin d'un testament international sont régies par la loi en vertu de laquelle la personne habilitée a été désignée.
Les termes « conditions auxquels un témoin » visent non seulement la capacité générale du témoin, mais aussi les éventuelles restrictions particulières imposées par la législation applicable de l'Etat.
Partant, les dispositions de la loi organique du notariat relatives aux conditions auxquelles doit satisfaire un témoin s'appliquent au testament international.
En vertu de l'article 10, alinéas 2 et 4, de la loi organique du notariat, le testament international est toujours reçu par un ou plusieurs notaires assistés de deux témoins (alinéa 2) et les parents et alliés au degré prohibé par l'article 8 (alinéa 4) ne peuvent être témoins.
L'article 10, combiné à l'article 8, alinéa 1er, n'établit pas de distinction en ce qui concerne les conditions auxquelles les témoins doivent satisfaire, entre, d'une part, les témoins d'un testament fait par acte public et, d'autre part, les témoins d'un testament international.
Il ressort expressément de l'article 10, alinéa 2, que cet article de la loi est applicable au testament international. La prohibition de la parenté prévue à l'alinéa 4 dudit article de loi, combiné à l'article 8, alinéa 1er, de la même loi, vaut par conséquent pour le témoin d'un testament international.
Par conséquent, l'arrêt attaqué viole l'article 10, alinéas 2 et 4, combiné à l'article 8, alinéa 1er, de la loi organique du notariat.
En effet, le fait que ni lesdits articles 4.1., 5.1. et 5.3. ni aucune autre disposition de la loi du 2 février 1983 ne mentionnent les conditions auxquelles le témoin doit satisfaire, ne fait pas obstacle à ce que les dispositions précitées de la loi organique du notariat relatives à ces conditions soient applicables au testament international, comme il a été dit ci-dessus.
Bon à savoir
Pour qu'un testament international reçu par un notaire belge soit valable en la forme, il est requis que les deux témoins satisfassent aux conditions prévues par la loi en vertu de laquelle la personne habilitée a été désignée, à savoir en l'espèce la loi du 16 mars 1803 contenant organisation du notariat, et que, dès lors, ils ne soient pas alliés au troisième degré du testateur.2
Par conséquent, méconnaît les articles 8 et 10, alinéa 4, de la loi du 16 mars 1804 contenant organisation du notariat l'arrêt qui, après avoir constaté qu'un des deux témoins était un allié au troisième degré de la testatrice, décide que le testament est nul en tant que testament authentique mais peut néanmoins produire ses effets en tant que testament international.
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1. Cour de cassation, 1ère ch., 24/01/2008, Pas., 2008/1, p. 228.
2. E. de Wilde D'estmael, C. Thomasset, A.-C. Van Gysel, « Testaments - Forme », Rép. not., Tome III, Successions, donations et testaments, Livre 8/1, Bruxelles, Larcier, 2006, n° 238 ; Y.-H. Leleu, « Section 1. - Les conditions de formes de formation des testaments » in Chroniques notariales – Volume 55, Bruxelles, Éditions Larcier, 2012, pp. 26-58.