Le notaire et son devoir de conseil - Responsabilité
Présentation des faits 1
Madame A était propriétaire avec son époux B d'un bien immeuble situé à Malmedy.
Au décès de l'époux B, Madame A a reçu la part de son époux en usufruit et ses trois petits enfants ont reçu la nue-propriété. Madame C est la fille d'un des trois petits-enfants.
En 2006, Madame C a eu la proposition de devenir propriétaire de cet immeuble. Celle-ci a donc consulté le notaire Y, tandis que Madame A et ses enfants ont, quant à eux, consulté le notaire X.
Le notaire X propose la formule suivante : un premier acte où Madame A fait donation à sa petite fille et ses deux fils de sa moitié en nue-propriété, puis un second acte constatant la sortie d'indivision entre les indivisaires.
Le notaire Y adresse les projets d'actes à Madame C et lui indique que le décompte du notaire X est exact. Selon le notaire X, la quote-part à assumer par Madame A dans les frais de donation-partage sont de 4.264,67 euros.
Trois jours après la passation des actes authentiques, le notaire X écrit à Madame C pour lui indiquer que l'administration de l'enregistrement considère que l'opération qui a été réalisée n'est un partage que pour moitié et que pour l'autre moitié, il s'agit d'une vente. Partant, un droit d'enregistrement de 12,5 % est dû au lieu de 1 %, soit un supplément de 8.265 €.
Le notaire X conteste avoir commis une faute professionnelle tandis que le notaire Y a versé spontanément la moitié des 8.265 € à Madame C.
Madame C a introduit une procédure judiciaire à l'encontre du notaire X. Celle-ci postule la condamnation du notaire X à des dommages et intérêts évalués à 4.312,52 € pour la faute commise dans son devoir de conseil.
Décision de la Cour d'appel de Mons
La Cour d'appel de Liège constate que le notaire Y et le notaire X ont été consultés pour trouver la solution juridique la plus adaptée permettant à Madame C de reprendre le bien familial en réduisant le plus possible les frais. Le notaire X a proposé de faire deux actes juridiques, à savoir, une donation suivie d'un partage permettant d'avoir des droits d'enregistrement réduits.
La Cour expose que le notaire X a commis une faute professionnelle étant donné qu'il a induit ses clients en erreur quant aux conséquences fiscales des actes authentiques.
Le notaire X ne s'est dès lors pas comporté comme un notaire normalement prudent et avisé placé dans des circonstances semblables.
La conséquence de la faute du notaire X est que Madame C a dû payer des droits d'enregistrement supplémentaires par la faute commise par celui-ci. Or, sans la faute du notaire, le dommage subi par Madame C ne se serait pas produit tel qu'il s'est réalisé in concreto.
Par conséquent, la Cour condamne le notaire X a payé la somme de 4.312,50 € à Madame C à titre de dommages et intérêts.
Bon à savoir
L'article 9, § 1er, alinéa 3 de la loi organique du notariat 2, dispose que le notaire informe toujours et entièrement les parties des droits, des obligations et des charges découlant des actes juridiques pour lesquels il intervient et conseille ses clients.
Partant, le notaire doit éclairer les parties à l'acte sur la portée et les effets de leurs engagements. Il doit également indiquer aux parties les risques que présente l'opération, tant juridiquement que fiscalement. 3
Le notaire est donc tenu d'informer les parties, d'une part, des droits d'enregistrement dont les actes sont frappés et, d'autre part, des allégements fiscaux dont ils peuvent bénéficier.
Par conséquent, même si le paiement des droits d'enregistrement procède de la loi, le paiement par un client d'un supplément imprévu par rapport à celui qui a été déterminé par le notaire constitue un dommage directement causé par sa faute. Le notaire est donc tenu d'indemniser ce dommage à concurrence du supplément. 5
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1. Liège, (3e chambre), 1er octobre 2012, J.L.M.B., 2013/40, p. 2055.
2. Loi du 4 mai 1999 (loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat).
3. Fr. Glansdorff, « Introduction générale », in Les obligations d'information, de renseignement, de mise en garde et de conseil, Formation permanente CUP, mars 2006, vol. 86, p. 123.
4. C. Melotte, « La responsabilité professionnelle des notaires », in Responsabilités, Traité théorique et pratique, Titre II/dossier 28, n° 49, p. 19.
5. Liège, 30 janvier 2012, J.L.M.B., 2013/40, p. 2051.