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NOTAIRE

Bon a savoir

27 Mai 2015

Levée d'un certificat hypothécaire : Faute du notaire

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Présentation des faits 1         

Par acte notarié du 13 juin 1985, reçu par le notaire C., en présence du notaire H, Madame T. et Monsieur D. ont acquis un appartement dans un immeuble.

Alors que l'acte précise que le bien est vendu quitte et libre de toutes charges privilégiées ou hypothécaires quelconques, les acquéreurs ont appris quelques mois plus tard que l'appartement était, depuis le 11 janvier 1975, grevé d'une hypothèque au profit de la s.a. B, aux droits de laquelle a succédé en juillet 1986 la s.c.r.l. R.

A diverses reprises entre fin 1987 et début 1992, la s.c.r.l. R. a diligenté des actes de poursuite de la procédure d'exécution. Le 11 décembre 2000, elle sollicitait en outre le renouvellement de la transcription de la saisie-exécution immobilière.

Par citation du 24 janvier 1991, les époux se sont associés au notaire pour introduire contre la s.c.r.l. R. une action devant le Tribunal de première instance de Bruges, tendant à contester la validité de sa créance hypothécaire.

Par la présente action, les époux demandent que les notaires C et H soient condamnés in solidum à consigner les sommes nécessaires au désintéressement du créancier hypothécaire et à leur payer 20.000 euros en réparation du préjudice subi en raison de ce que, par leur faute, l'appartement litigieux n'a pas été délivré quitte et libre.

Le premier juge a retenu une faute dans le chef des deux notaires. Toutefois, il a réservé à statuer sur le dommage et le lien de causalité, estimant que l'issue de la procédure intentée par les parties devant le Tribunal de première instance de Bruges contre la s.c.r.l. R. et visant à remettre en cause la validité de l'hypothèque, pouvait avoir une incidence sur la demande de consignation et sur l'existence et l'évaluation du dommage et du lien causal.

 

Décision de la Cour d’appel de Liège

La Cour rappelle l'obligation élémentaire qui pèse sur tout notaire, à savoir le fait de vérifier avec minutie la situation hypothécaire du bien lorsqu'il reçoit un acte de vente ou de prêt.

En l'espèce, la faute des notaires est patente. Le notaire C. n'a préalablement à l'acte, levé aucun état hypothécaire trentenaire, ni vérifié qu'un tel état avait été levé. Il ne pouvait en aucune manière, comme il tente de le laisser entendre, se contenter de faire confiance aux mentions de l'acte dressé par le notaire H. le 16 août 1982 qui, erronément, omettait l'existence de l'inscription hypothécaire.

La responsabilité du notaire H est également bien engagée, ce qu'il ne semble pas contester, dès lors qu'il a reçu l'acte aux côtés de son confrère, en qualité de notaire des acheteurs, authentifiant la vente « pour quitte et libre de tous privilèges et hypothèques », sans avoir vérifié l'exactitude de cette mention.

En ce qui concerne le lien causal, la Cour considère que la levée d'un certificat hypothécaire préalablement à la passation de l'acte authentique du 13 juin 1985 aurait en l'espèce fait apparaître que le bien n'était pas quitte et libre de toute charge et aurait évité que les appelants n'acquièrent un appartement grevé d'hypothèque, avec toutes les conséquences dommageables qui en découlent.

Les appelants démontrent ainsi que le dommage, tel qu'il s'est produit et se poursuit éventuellement à ce jour, ne se serait pas réalisé sans la faute commise par les notaires.

Pour ce qui est du dommage, les appelants ont subi un dommage certain. Si la procédure poursuivie aboutit à ce que l'hypothèque de la Rabobank soit annulée, il n'y aura plus de nouveau dommage pour les appelants mais le dommage déjà encouru ne sera pas effacé et peut être dès à présent examiné. Si par contre, pareil aboutissement ne se concrétise pas de manière rapide, et compte tenu de ce que la Cour n'estime pas devoir faire droit à la demande de consignation des sommes nécessaires au désintéressement du créancier, le dommage des appelants risque de s'aggraver, raison pour laquelle il convient de statuer à titre provisionnel.

En somme, le dommage a été causé par les fautes concurrentes des deux notaires, chacun de ceux-ci est tenu in solidum envers les préjudiciés à la réparation complète du dommage et peut se retourner contre le coresponsable, à concurrence de ce qu'il aurait payé au-delà de la part de responsabilité qui doit lui être délaissée.

La responsabilité du notaire C. est plus importante dès lors qu'en tant que notaire instrumentant, il devait se charger des recherches hypothécaires qui n'ont pas été faites. Sa responsabilité est engagée à concurrence de 80%, 20% incombant au notaire H. qui a omis d'attirer l'attention de son collègue sur cette formalité et ne s'est pas soucié de vérifier la présence de cet état hypothécaire.

 

Bon à savoir

L'obligation élémentaire qui pèse sur tout notaire consiste à vérifier avec minutie la situation hypothécaire du bien lorsqu'il reçoit un acte de vente ou de prêt. 2

Le notaire qui mentionne dans un acte de vente que l'immeuble est vendu quitte et libre de toutes charges privilégiées et hypothécaires généralement quelconques sans avoir, préalablement à l'acte, levé de certificat hypothécaire, ni vérifié qu'un tel certificat a été levé, commet une faute. 4

La responsabilité du notaire des acquéreurs est également engagée, toutefois dans une moindre mesure, dès lors qu'il a reçu l'acte aux côtés de son confrère, authentifiant la vente « pour quitte et libre de toutes charges » sans avoir vérifié l'exactitude de cette mention. 5

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

__________________

1. Liège, 1er février 2007, R.G.A.R., 2009/1, p. 14462.

2. G. DE LEVAL., « Ordre », Rép. not., Tome XIII, La procédure notariale, Livre 4/5, Bruxelles, Larcier, 2013, n° 15.

3. Gand (1e  ch.) 7 octobre 2004, T. Not. 2006, liv. 2, 76.

4. Voyez également : Bruxelles (1e  ch.) 20 janvier 2009, TBO 2009, liv. 6, 253 ; E. ROELEN, « Les formalités hypothécaires » in La vente publique dans tous ses états, Bruxelles, Éditions Larcier, 2014, p. 161-179.

5. C. HOLLANDERS DE OUDERAEN., « Cadastre », Rép. not., Tome II, La propriété immobilière, Livre 4, Bruxelles, Larcier, 1987, n° 161.