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AVOCAT

Bon a savoir

4 Décembre 2015

La responsabilité financière de l’avocat à l’égard d’un correspondant étranger

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Présentation des faits 1

Madame K. a consulté Maître M. pour assurer la défense de ses intérêts dans le cadre d’un litige à caractère qui la concernait.

Maître M. a fait appel à l’avocate B., en vue de le remplacer aux audiences qui auraient lieu en Suisse, devant le tribunal de première instance de Genève. Une convention de mandat a d’ailleurs été signée le 16 janvier 1991 par l’avocate B. et Madame K., prévoyant que « le mandant s’engage à verser au mandataire toutes provisions nécessaires à l’exécution du mandat. Il s’oblige à rembourser tous frais, débours ou avances qui auraient été engagés par le mandataire, ainsi qu’à acquitter ses honoraires ».  

Cette dernière a effectué les remplacements à l’étranger et a réclamé ses honoraires dans un délai de trois mois.

N’Etant pas payée, l’avocate B. a cité en justice Maître M. en paiement de ses honoraires.

Par son jugement du 22 septembre 1998, le tribunal de première instance de Bruxelles a condamné Maître M. à payer les honoraires de l’avocate B., à majorer des intérêts compensatoires, des intérêts judiciaires et des dépens.

Maître M. a alors interjeté appel dudit jugement.

Celui-ci reproche au premier juge de ne s’être basé que sur des règles déontologiques organisant l'exercice de la profession d'avocat qui ne constitueraient que des recommandations internes à l'Ordre des avocats et ne s'imposeraient pas à l'ordre judiciaire.

Maître M. estime que le premier juge n'a pas tenu compte de l'existence de la convention de mandat signée le 16 janvier 1991 par Madame K et par l’avocate B. Maitre M. soutient que, par cette convention, l'avocate B. serait devenue la mandataire de Madame K. exclusivement, qui s'engageait explicitement à payer ses honoraires.

 

Décision de la Cour d’appel de Bruxelles

La Cour d’appel de Bruxelles rappelle tout d’abord que conformément à l’article 440, alinéa 2, du Code judiciaire, « l'avocat comparaît comme fondé de pouvoir sans avoir à justifier d'aucune procuration, sauf lorsque la loi exige un mandat spécial ». Il s'agit d'un mandat ad litem qui se prouve par la seule affirmation de l'avocat (Fettweis, Introduction au droit judiciaire - Les institutions, Liège, 6e éd., 1979, pp. 194 à 197, nos 425 à 435).

La Cour d’appel précise à cet égard que l'avocat encourt une responsabilité financière envers l'avocat étranger choisi comme correspondant, avec qui il traite au nom de son client, en raison de la présomption de mandat de l'article 440, alinéa 2, du Code judiciaire qui repose désormais sur lui.

Dans le même ordre d’idées, le Recueil des règles professionnelles de l'Ordre français des avocats du barreau de Bruxelles énonce :

-          no 350 : « Pour autant que ces frais aient été réclamés dans un délai normal, l'avocat est financièrement responsable à l'égard des tiers qu'il choisit (correspondant, huissier, experts,etc.) pour les devoirs qu'il leur demande, sauf s'il les a avertis préalablement et par écrit que ces frais devaient être réclamés directement au client ».

-          no 425 : « Dans les relations professionnelles entre avocats de barreaux de pays différents, celui qui, ne se bornant pas à recommander un confrère ou à l'introduire auprès d'un client, confie une affaire à un correspondant ou le consulte, est personnellement tenu, même en cas de défaillance du client, au paiement des honoraires, frais et débours dus au conseil étranger ; cependant, les avocats concernés peuvent, au début de leurs relations, convenir de dispositions particulières à ce sujet ; ... ».

La Cour se pose ensuite la question de savoir, si en l’espèce, Maître M.  s'est contenté ou non de recommander à Madame  K. un confrère genevois (Madame B.) et à introduire cette dernière auprès de Madame K., auquel cas il ne serait pas mandataire et ne serait pas tenu sur le plan financier. Si par contre, Maître a choisi un correspondant à Genève, il reste alors le mandataire de Madame K. et demeure tenu du paiement des honoraires de son correspondant, Madame B., en cas de défaillance de Madame K.

La Cour observe en l’espèce que l’identité du mandant manque sur la procuration du 16 janvier 1991, de même que la détermination des actes pour lesquels le mandant donne pouvoir à Madame B. de ne le représenter. Il est ainsi difficile de déterminer les limites du mandat. Enfin, la signature du mandant est illisible et non authentifiée. Dans la mesure où Maître M. reconnaît avoir organisé son « remplacement » en Suisse, il paraît bien avoir appel à Madame B. en tant que correspondant étranger pour poursuivre la procédure menée en Suisse.

Par ailleurs, la circonstance que la convention de collaboration prévoit expressément que le client payera au collaborateur de son avocat les provisions nécessaires et remboursera les frais et honoraires ne change rien au principe que le mandataire principal, ayant fait appel à une collaboration extérieure, reste responsable financièrement envers les tiers avec qui il traite, en cas de défaillance du client.

La Cour d’appel constate, en outre, que Madame B. a réclamé ses honoraires dans un délai normal de trois mois et que Maître M. est en défaut de rapporter la preuve qu’il a averti préalablement par écrit l’avocate B. de ce que ces frais devraient être réclamés directement à Madame K.

Eu égard à ces considérations, la Cour d’appel de Bruxelles estime que la décision prise par le premier juge doit être confirmée et, partant, déclare l’appel de Maître M. recevable mais non fondée.

 

Bon à savoir

L’avocat est financièrement tenu à l’égard des tiers qu’il choisit (confrère, huissier, expert, ...) pour les devoirs qu’il leur demande au nom de son client, sauf clause contraire2.

Cette responsabilité que l’avocat encourt sur le plan financier à l’égard des tiers découle de la présomption de mandataire qui repose désormais sur lui, conformément à l’article 440, alinéa 2 du Code judiciaire3.

Les avocats ont été contraints de plus en plus à la collaboration de confrères en raison de la dispersion des juridictions et de la variabilité des heures d’audiences. Cette collaboration organisée entre les avocats ne doit pas tromper le client et doit être portée à sa connaissance C’est la raison pour laquelle il convient que le client ait contractuellement accepté cette éventuelle substitution d’avocat. Les conventions de collaboration sont d’ailleurs soumises aux autorités de l’Ordre des avocats4.

La circonstance que la convention de collaboration mentionne expressément que le client payera au collaborateur de son avocat les provisions nécessaires, frais et honoraires ne change rien au principe que le mandataire principal, ayant fait appel à une collaboration extérieure, reste tenu financièrement envers le tiers avec qui il traite, en cas de non-respect par le client de la convention5.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

______________

1. Bruxelles (16e ch.), 26 novembre 2002, J.T., 2004/4, n° 6124, pp. 75-76.

2. C. LECLERCQ, Devoirs et prérogatives de l’avocat, Bruylant, 1999, p. 229, no 229 ; G.-A. D., « Observations », sous Bruxelles (16e ch.), 26 novembre 2002, J.T., 2004/4, n° 6124, pp. 75-76.

3. FETTWEIS, Introduction au droit judiciaire - Les institutions, Liège, 6ème éd., 1979, pp. 194 à 197, nos 425 à 435 ; Rép. prat. dr. belge, compl., t. VI, vo « Avocat », p. 192, no 309.

4. C. LECLERCQ, Devoirs et prérogatives de l’avocat, Bruylant, 1999, p. 220, no 103

5. Bruxelles (16e ch.), 26 novembre 2002, J.T., 2004/4, n° 6124, pp. 75-76.