Toggle Menu
1 Avocat(s) expérimenté(s)
Près de chez vous
  • R Rédacteur
  • F Formation
Testez gratuitement pendant 1 mois sans engagement
Tous nos articles scientifiques ont été lus
72 341 fois le mois dernier
7 050 articles lus en droit immobilier
14 623 articles lus en droit des affaires
8 841 articles lus en droit de la famille
15 643 articles lus en droit pénal
2 523 articles lus en droit du travail
Vous êtes avocat et vous voulez vous aussi apparaître sur notre plateforme?  Cliquez ici
Testez gratuitement pendant 1 mois sans engagement
Vous êtes avocat et vous voulez vous aussi apparaître sur notre plateforme?  Cliquez ici

AVOCAT

Bon a savoir

1 Avril 2016

Les demandes virtuellement comprises dans l'acte introductif d'instance

Cette page a été vue
2174
fois
dont
1
le mois dernier.

Présentation des faits1

Madame X a été victime d’une infraction pénale et s’est constituée partie civile entre les mains du juge d’instruction, et ce, en vue de demander la réparation de son dommage moral. En cours de procédure devant le tribunal correctionnel, elle est venue compléter sa demande originaire en demandant la réparation de son dommage matériel, mais elle s’est vue opposer une exception de prescription. La défense considérait que, dans la mesure où la constitution de partie civile ne visait que la réparation du dommage moral, le droit de la victime à obtenir la réparation de son dommage matériel ne pouvait pas bénéficier de l’effet interruptif de la prescription attaché à la constitution de partie civile.

La Cour d’appel de Gand a, dans un arrêt rendu le 25 juin 2009, fait droit aux arguments de la défense et a, donc, rejeté la demande en réparation du dommage matériel de Madame X, pour cause de prescription. La Cour a, en effet, estimé que cette demande et la demande en réparation du dommage moral avaient des causes différentes. Dès lors, la constitution de partie civile n’avait pas pu interrompre la prescription de l’action en réparation du dommage matériel.

Madame X a, alors, introduit un pourvoi en cassation devant la Cour de cassation. 

Décision de la Cour

La Cour de cassation rappelle tout d’abord qu’en vertu de l’article 2244 du Code civil, une citation en justice forme l’interruption civile, et, que, par citation en justice, il y a lieu d’entendre également la constitution de partie civile entre les mains du juge d’instruction.

La Cour rappelle également qu’une citation en justice interrompt la prescription pour la demande qu’elle introduit et pour celles qui y sont virtuellement comprises.

La Cour précise ensuite qu’une demande introduite en réparation d’une partie du dommage causé par une infraction interrompt la prescription à l’égard de la partie du dommage qui ne fait pas directement l’objet de la demande. Toutefois, l’interruption par la constitution de partie civile ne s’étend pas à une demande dont la cause est différente.

Après avoir rappelé que la cause d’une demande est l’ensemble des faits et agissements sur lesquels la partie fonde la demande qu’elle introduit, la Cour énonce que les deux demandes de réparation du dommage moral et du dommage matériel procèdent de la même cause, à savoir le fait dommageable qui fonde la constitution civile.

Dès lors, la Cour décide que la demande en réparation du dommage matériel était virtuellement comprise dans la constitution de partie civile, réclamant la réparation du dommage moral et bénéficiait, ainsi, de l’effet interruptif de la prescription attaché à la constitution de partie civile.

Par conséquent, la Cour casse l’arrêt de la Cour d’appel de Gand pour méconnaissance de la notion de « demande virtuellement comprise » dans la citation initiale.

Bon à savoir

Il est de jurisprudence constante que la citation en justice interrompt la prescription non seulement pour la demande qu’elle introduit, mais aussi pour celles qui sont virtuellement comprises dans l’objet de la demande originaire2.

Il convient, pour apprécier si une demande est virtuellement comprise dans la demande initiale, de tenir compte de leur objet et de leur cause, et non de l’objectif de la législation concernée par les demandes3.

Conformément à la conception factuelle de l’objet et la cause de la demande, consacrée par la Cour de cassation4, la saisine du juge s’étend à l’ensemble des faits qui servent de base à la prétention du demandeur, sans avoir égard à sa qualification juridique. Ainsi, même dans l’hypothèse où le demandeur n’a pas formellement exprimé une prétention, elle peut néanmoins être implicitement comprise dans sa demande, lorsqu’elle peut être déduite des faits invoqués à l’appui de la prétention soumise au juge.

La demande virtuellement comprise est, donc, une prétention qui, quoi que n’étant pas explicitée dans la demande originaire, était implicitement incorporée d’emblée dans cette dernière. En d’autres termes, elle est un accessoire éminemment prévisible, qui a la même cause que la demande originaire.

L’inclusion virtuelle d’une demande dans la demande principale suppose toutefois que les termes de l’acte introductif d’instance soient suffisamment clairs pour que la partie adverse s’attende à une demande complémentaire.

En l’espèce, la demande en réparation du dommage matériel était bien fondée sur les mêmes faits que la demande en réparation du dommage moral initiée dans la constitution de partie civile. Ainsi, le responsable du dommage n’a pas pu être surpris par ce complément de demande qui était déjà virtuellement inclus dans la demande en réparation du dommage moral subi par la victime5.

 _______________

1. Cass., 12 janvier 2010, R.G.C.D., 2010, pp. 400 et s.

2. Cass., 4 mai 1990, Pas., 1991, p. 226 ; Cass., 24 avril 1992, Pas., 1992, p. 745.

3. Cass., 8 mai 2006, Pas., 2006, p. 1078. M. Regout-Masson, « La prescription des actions en matière de responsabilité. Volume 2. Les avatars de la prescription », in Responsabilités. Traité théorique et pratique, Titre VI, livre 63bis, p. 17.

4. Cass., 23 octobre 2006, S050010F ; Cass., 2 avril 2010, CF090204F ; Voy. not. J.-F. Van Drooghenbroeck, « Le juge et le contrat », R.G.D.C., 2007, pp. 595-620.

5. M. Dupont, « L’interruption de la prescription et les demandes virtuellement comprises dans la citation », note sous Cass., 12 janvier 2010, R.G.D.C., 2010, pp. 404-405.