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AVOCAT

Bon a savoir

15 Aout 2014

Le secret professionnel de l'avocat dans le cadre d'une perquisition

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Présentation des faits 1

Par une ordonnance, la chambre du conseil renvoya quatre prévenus devant le tribunal correctionnel du chef de faux et usage de faux en écritures, de faux en vue d'éluder la T.V.A. et d'association de malfaiteurs. L'un des prévenus est avocat. Il était reproché aux prévenus d'avoir contribué à la réalisation d'un montage suivant lequel les transactions seraient intervenues à Luxembourg alors que, en réalité, elles auraient été conclues à Bruxelles dans l'intention d'éluder la T.V.A. belge.

Des perquisitions furent organisées au siège de plusieurs sociétés ainsi qu'au domicile et au cabinet de l'avocat. Ces perquisitions eurent lieu en présence du magistrat instructeur et d'un représentant de l'Ordre néerlandais des avocats du barreau de Bruxelles. À l'issue des perquisitions, des documents et un back-up d'un ordinateur furent saisis.

Devant le tribunal, l'avocat demande à ce que certaines pièces saisies soient produites alors que les autres prévenus s'y opposent en prétextant que ces documents sont couverts par le secret professionnel auquel est tenu l'avocat.

Jugement du Tribunal correctionnel de Bruxelles

La question de la production des pièces saisies est examinée par le tribunal. L'avocat demande que des pièces soient produites alors que certaines d'entre elles sont couvertes par le secret professionnel.

Le tribunal rappelle que l'article 458 du Code pénal, portant sur le secret professionnel et sa violation, connaît deux exceptions dans lesquelles la violation du secret n'est pas répréhensible.

Conformément à l'esprit du législateur, le tribunal avance qu'il convient d'ajouter une exception visant le cas particulier où un avocat est personnellement mis en cause. Comme tout justiciable, le dépositaire d'un secret professionnel a droit à un procès équitable. S'il est appelé à se défendre en justice, il doit pouvoir rompre le secret auquel il est tenu pour assurer sa défense.

En conséquence, le tribunal autorise l'avocat à produire les pièces mentionnées dans le cadre de l'exercice de ses droits de défense sans qu'il y ait violation du secret professionnel.

Bon à savoir

Le secret professionnel de l'avocat trouve son fondement dans la nécessité de donner à ceux qui exercent cette profession les garanties nécessaires de confiance et ceci dans l'intérêt général en sorte que tous ceux qui s'adressent à eux en confiance, aient la certitude qu'ils peuvent leur confier leur secret sans danger de révélations à des tiers 2. Le législateur a entendu protéger non seulement des intérêts particuliers mais aussi une valeur éminente, la nécessaire discrétion que requièrent les confidences reçues dans l'exercice de certaines professions comme celle de l'avocat 3.

L'article 458 du Code pénal connait deux exceptions, le témoignage et l'obligation légale de dévoiler les informations couvertes par le secret professionnel. Néanmoins, une autre exception implicite doit être ajoutée, la défense en justice. Lorsqu'un avocat est appelé à se défendre personnellement, ses droits à la défense et à un procès équitable, dans la mesure nécessaire à leur exercice, priment les valeurs protégées par le secret professionnel 4.

Ce constat a été entériné par la Cour de cassation qui a décidé que la violation du secret professionnel peut être justifiée par un état de nécessité lorsqu'il résulte des circonstances de fait et de l'appréciation de la valeur respective des droits en conflit que l'auteur n'avait pas la possibilité de sauvegarder, autrement qu'en commettant une violation du secret professionnel, un intérêt plus impérieux qu'il avait le devoir ou qu'il était en droit de sauvegarder avant tous les autres 5.

Le dépositaire du secret professionnel ne peut se retrancher derrière le secret professionnel afin de se soustraire à des poursuites 6. Il appartient au magistrat instructeur seul, après avis d'un représentant professionnel qualifié, de décider quelles sont les pièces qui sont couvertes par le secret professionnel et qui ne peuvent, dès lors, être saisies. En dernier ressort, c'est à la juridiction de fond qu'il appartiendra de se prononcer sur le caractère confidentiel ou non de la pièce saisie. À partir du moment où le dépositaire du secret est lui-même en cause, il y a lieu de considérer les pièces en relation directe avec l'infraction comme non couvertes par le secret professionnel, ce secret ne pouvant servir à couvrir des infractions ou, s'il s'agit d'un élément à décharge, le secret devant céder le pas sur le respect dû aux droits de la défense 7.

Il en découle que, lorsque des pièces ont été saisies dans un cabinet d'avocat et que l'avocat n'est pas en cause, il appartient au juge du fond d'apprécier si, parmi les documents saisis, ne figureraient pas des documents couverts par le secret professionnel et, dans l'affirmative, de les rejeter des débats. Par contre, si une perquisition a été menée dans un cabinet d'avocat et que cet avocat est en cause comme complice ou coauteur dans les faits qui font l'objet de l'instruction, la saisie pourra porter sur tous les documents ou éléments en relation directe avec la ou les infractions sans aucunement tenir compte du souhait éventuel des personnes poursuivies de ne pas voir produites des pièces théoriquement couvertes par le secret professionnel, lequel, dans le cas d'espèce, ne peut ni être excipé par l'avocat, ni servir de refuge à ses co-prévenus.

_______________

1. Corr. Bruxelles, 29 mars 2001, J.T., 2001/27, p. 617.

2. Bruxelles, 18 juin 1974, J.T., 1976, p. 11.

3. P. Lambert, Le secret professionnel, Bruxelles, Nemesis, 1985, p. 27.

4. H. D. Bosly et D. Vandermeersch, Droit de la procédure pénale, Bruxelles, La Charte, 1999, p. 294.

5. Cass., 13 mai 1987, Pas., 1987, I, p. 1061.

6. Cass., 5 févr. 1985, Pas., 1985, p. 670

7. H. D. Bosly et D. Vandermeersch, op. cit., p. 401.