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La faillite personnelle dans la procédure collective d’apurement du passif
Le prononcé de la faillite personnelle peut intervenir à tout moment durant la procédure collective d’apurement du passif. Cela étant, la faillite personnelle ne peut être prononcée que contre certaines personnes. 7
Les personnes contre qui une faillite personnelle peut être prononcée sont des personnes physiques étant donné que les déchéances d’ordre civique et d’ordre professionnel ne peuvent se concevoir qu’à l’égard des personnes physiques. 8
Il y a donc trois catégories de personnes qui peuvent être concernées par la faillite personnelle, il s’agit des commerçants (associés solidairement responsables), des dirigeants de personnes morales assujetties aux procédures collectives et les personnes physiques représentants permanents de personnes morales dirigeantes. 9
La faillite personnelle trouve également à s’appliquer aux dirigeants ayant commis des fautes, et ce, même s’ils ne sont plus en fonction lors de la procédure collective d’apurement du passif. 10
Cela étant dit, pour que ces personnes physiques soient déclarées en faillite personnelle, il faut qu’elles aient commises un certain nombre d’actes déterminés qui sont considérés comme étant des cas d’ouverture d’une faillite personnelle. 11
L’Acte uniforme fait une distinction entre la faillite personnelle obligatoire et la faillite personnelle qui est facultative. 12 Par conséquent, selon la gravité de la faute commise par le débiteur ou le dirigeant, la faillite sera soit obligatoire soit facultative. 13
L’article 196 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif prévoit les cas où la faillite personnelle sera prononcée obligatoirement.
Ainsi, la juridiction compétente prononce la faillite personnelle des personnes qui ont 14 :
- soustrait la comptabilité de leur entreprise 15, détourné ou dissimulé une partie de son actif ou reconnu frauduleusement des dettes qui n'existaient pas ;
- exercé une activité commerciale dans leur intérêt personnel, soit par personne interposée, soit sous couvert d'une personne morale masquant leurs agissements ;
- usé du crédit ou des biens d'une personne morale comme des leurs propres ;
- par leur dol, obtenu pour eux-mêmes ou pour leur entreprise, un concordat annulé par la suite ;
- commis des actes de mauvaise foi ou des imprudences inexcusables 16 ou qui ont enfreint gravement les règles et usages du commerce. 17
Il est utile de préciser que sont présumés être des actes de mauvaise foi, imprudences inexcusables ou infractions graves aux règles et usages du commerce, et donc ouvrent la faillite personnelle à leur encontre 18 :
- l'exercice d'une activité commerciale ou d'une fonction de gérant, administrateur, président, directeur général ou liquidateur, contrairement à une interdiction prévue par les Actes uniformes ou par la loi de chaque Etat-partie ;
- l'absence d'une comptabilité conforme aux règles comptables et aux usages reconnus de la profession, eu égard à l'importance de l'entreprise ;
- les achats pour revendre au-dessous du cours dans l'intention de retarder la constatation de la cessation des paiements ou l'emploi, dans la même intention, de moyens ruineux pour se procurer des fonds ;
- la souscription, pour le compte d'autrui, sans contrepartie, d'engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation du débiteur ou de son entreprise ;
- la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire l'entreprise qu'à la cessation des paiements.
Enfin, sont également déclarés en faillite personnelle obligatoire, les dirigeants d'une personne morale condamnés pour banqueroute simple ou frauduleuse.
En ce qui concerne les cas d’ouverture de la faillite personnelle facultative, la juridiction compétente pourra prononcer la faillite personnelle des dirigeants lorsque ces derniers ont 19 :
- commis des fautes graves autres que celles visées à l'article 197 ci-dessus ou ont fait preuve d'une incompétence manifeste ;
- n'ont pas déclaré, dans les trente jours, la cessation des paiements de la personne morale ; 20
- n'ont pas acquitté la partie du passif social mise à leur charge.
La spécificité de la faillite personnelle facultative est que même si les fautes sont prouvées, il revient à la juridiction compétente de décider souverainement s’il y a lieu ou non de prononcer la faillite personnelle. 21
En tout état de cause, que les actes posés par le débiteur ou le dirigeant soient des actes relatifs à une faillite personnelle obligatoire ou facultative, cela n’a pas d’impact sur la procédure étant donné que, si la faillite personnelle est prononcée, la procédure sera la même qu’il s’agisse d’une faillite obligatoire ou facultative. 22
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7. S. TOE., Pratique judiciaire des procédures collectives OHADA, Editions universitaires européennes, Allemagne, 2012, p. 238.
8. Comp. Paris, 19 juin 1985, Gaz. Pal. 1985. 2. 514.
9. Tribunal de première instance de Libreville, Jugement, Répertoire n° 001/2000-2001 ; Samson NGOMO c/ Jean Géo PASTOURET et B.P.B.
10. Comp. Cass. Com, 9 décembre 1968, Bull. civ., IV, n° 348 ; F.M. SAWADOGO, OHADA : Droit des entreprises en difficulté, Bruxelles, Bruylant, 2002, p. 323 et suivantes.
11. Cour d'Appel d'Abidjan, Arrêt du 28/07/2000, www.ohada.com, Ohadata J-04-112.
12. Voyez l’article 198 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif.
13. J. ISSA-SAYEGH, « Présentation des dispositions sur les procédures collectives d'apurement du passif », www.ohada.com, Ohadata D-06-07.
14. Article 196 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif ; Cour d'appel de Brazzaville, Arrêt du 13/05/2013, Revue congolaise de droit, n° 14, p. 41.
15. Cass., com., 4 janvier 1960 et 14 mars 1961, D. 1961, 685, note A. Honorat ; Cass. Com., 27 octobre 1988, F. Aff., 1998, 2020.
16. Tribunal de Première Instance de Libreville, Jugement du 05/01/2001, www.ohada.com, Ohadata J-04-135.
17. Cour d'Appel de Brazzaville, Arrêt du 13/05/2013, Revue congolaise de droit, n° 14, p. 38.
18. Article 197 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif.
19. J. ISSA-SAYEGH, « Présentation des dispositions sur les procédures collectives d'apurement du passif », www.ohada.com, Ohadata D-06-07.
20. Y.B. MEUKE, « Quelques précisions sur la notion de cessation des paiements dans l'OHADA », www.ohada.com, Ohadata D-08-13.
21. Y. GUYON, Droit commercial (règlement judiciaire, liquidation de biens, suspension provisoire des poursuites, faillite personnelle), Licence en droit, Les court de droit, 1978-1979, p. 279.
22. S. TOE., Pratique judiciaire des procédures collectives OHADA, Editions universitaires européennes, Allemagne, 2012, p. 239.